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PARLEMENT ET DEMOCRATIE AU VINGT-ET-UNIEME SIECLE :
GUIDE DES BONNES PRATIQUES


4. Un parlement accessible

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Le chapitre précédent portait sur les différents moyens permettant aux citoyens de s'informer sur leur parlement. Sans une information précise et à jour sur le travail d'un parlement, on ne peut avoir la moindre influence sur les activités de cette institution, que ce soit à titre individuel ou par le truchement d'organisations structurées sur la base d'intérêts communs. Aussi le présent chapitre porte-t-il sur les divers moyens par lesquels les parlements s'ouvrent aux citoyens et aux groupes sociaux, et les moyens par lesquels ces derniers peuvent, à leur tour, espérer exercer une influence. Nous nous intéresserons tout d'abord aux modes de contact direct entre les citoyens et leurs représentants; puis à la façon dont les parlements peuvent donner satisfaction à ceux qui présentent des doléances; enfin aux possibilités, pour les citoyens, de dire leur mot dans le travail législatif et celui des autres commissions d'un parlement.

Contact direct entre les citoyens et leurs représentants

Depuis toujours, les citoyens ont accès à leur parlement par le truchement de leurs représentants élus. Dans la plupart des pays où les électeurs sont répartis entre des circonscriptions à base géographique et où les parlementaires représentent une localité spécifique, les contacts se font le plus souvent lors d'entrevues dans la région où les électeurs résident. Les partisans de ces systèmes estiment que leur principale vertu est que les parlementaires s'informent directement auprès de leurs électeurs des problèmes et préoccupations et non en se fiant à des rapports, surtout lorsqu'il s'agit d'évaluer l'impact d'une loi. L'envers de la médaille, comme l'indiquent plusieurs de nos correspondants, est que les parlementaires finissent parfois par devenir des assistants sociaux à plein temps. "Les électeurs s'attendent qu'une fois élu leur représentant soit à leur disposition en tout temps et en toute circonstance, qu'il s'agisse d'un baptême, de funérailles ou d'aide sociale" (communication du Mali). Pour un parlementaire, c'est un exercice d'équilibriste particulièrement ardu que de répondre aux attentes légitimes de ses mandants, qui souhaitent qu'il comprenne et défende leurs points de vue et leurs intérêts, tout en se ménageant le temps de s'acquitter de sa fonction législative et de ses autres tâches parlementaires.

A notre époque, l'utilisation du courriel accélère considérablement les contacts entre les électeurs et leurs représentants. Pourtant, comme nous l'avons déjà vu, la "fracture numérique" exclut de nombreux citoyens. C'est la raison pour laquelle, dans de nombreux pays, la possibilité de rencontrer directement les parlementaires, que ce soit à titre individuel ou en groupe, en évitant les frais de voyage et les pertes de temps, revêt une si grande importance. Encore faut-il que le parlementaire ait du temps et que sa circonscription ait des moyens.

Pour ce qui est du temps, beaucoup de parlements permettent aux parlementaires de consacrer une journée ou deux, au début ou à la fin de chaque semaine, à la visite de leur circonscription. Au Sri Lanka, le Parlement siège la première et la troisième semaine de chaque mois, la seconde et la quatrième étant réservées au travail dans les circonscriptions, de sorte que les électeurs puissent rencontrer leurs parlementaires. Au Chili, les deux chambres du Parlement siègent trois semaines par mois, "de manière que, pendant la quatrième semaine, les élus puissent s'occuper des affaires de leur district ou région et maintenir un dialogue permanent avec leurs électeurs". Dans certains pays, la fonction de parlementaire est encore une activité à temps partiel, les représentants du peuple conservant leur profession normale. A Malte, les parlementaires "rendent visite à leurs électeurs à leur domicile, à l'hôpital et sur leur lieu de travail afin de s'informer au mieux de leurs besoins quotidiens et ces visites sont fréquentes. Cet Etat est d'une taille qui permet aux parlementaires de s'occuper personnellement des citoyens et, si nécessaire, de leurs expliquer les mesures décidées dans le cadre des lois adoptées par le Parlement". En République populaire de Chine, où les distances sont autrement plus grandes, le Parlement ne se réunit en plénière que quelques jours par an, pour laisser aux parlementaires, là aussi, la possibilité d'exercer leur profession à mi-temps. "Cette solution leur permet de rencontrer directement les électeurs, de ressentir leurs difficultés et de comprendre leurs aspirations……Ils contribuent également à l'application de la Constitution et des lois, par le travail qu'ils effectuent mais aussi par leur vie sociale". Ce système présente donc bien des avantages mais les parlementaires risquent, de l'aveu même des deux parlements de ne pas être suffisamment formés à leur travail législatif. En ce qui concerne la Chine, on notera que le Comité permanent de l'Assemblée populaire nationale se réunit sans interruption entre les sessions du Parlement.

   Permanences locales

Le bureau de circonscription ou de district est un lieu de rencontre irremplaçable qui permet aux électeurs d'entrer en contact avec leurs élus et avec le personnel local. Vu son importance, beaucoup de parlements de pays en développement ont lancé de vastes programmes visant à installer des permanences dans chaque circonscription, pour que les parlementaires puissent rencontrer leurs électeurs. En Zambie, c'est même l'un des objectifs principaux d'un ambitieux programme de réforme parlementaire. Dans un premier temps, trois types ou modèles de permanences pilotes ont été mis en place afin de déterminer lequel était le plus apte à améliorer les relations entre parlementaires et électeurs :

  • Les permanences fixes.
  • Les permanences avec budget déplacements permettant au parlementaire de se rendre en personne aux quatre coins de sa circonscription.
  • Les permanences itinérantes consistant en une Land Rover équipée d'un ordinateur et d'un téléphone portable.

Des personnels administratifs ont été recrutés et formés à ces trois types de permanences. Des trois modèles, c'est la permanence fixe qui s'est avérée la plus efficace. Les électeurs ont trouvé les "permanences avec budget déplacements" éphémères, imprévisibles et difficile d'accès, alors que les "permanences itinérantes" posent des problèmes d'entretien technique. En conclusion, la Commission parlementaire des réformes et de la modernisation a fait les recommandations suivantes :

  • Adoption du modèle de permanence fixe, avec un budget déplacements limité afin d'améliorer les contacts entre les parlementaires et leurs électeurs.
  • Participation de la collectivité au choix du site des permanences.
  • Garantie, par l'Assemblée nationale, que les collaborateurs professionnels et autres employés de la permanence soient indépendants des partis.
  • Dotation des permanences, par l'Assemblée nationale, en documents de base traduits dans les langues locales, si possible.
La Commission a estimé que ces permanences rendent les parlementaires beaucoup plus accessibles. A la base de ce succès on trouve l'engagement, la motivation et le travail accompli par le parlementaire et son collaborateur professionnel.

Au Zimbabwe, un processus de réforme similaire a abouti à la création de centres d'information parlementaires (PCIC) dans les 120 circonscriptions, essentiellement pour permettre aux citoyens et aux organisations locales de s'entretenir avec les parlementaires de leurs problèmes et besoins. Ces centres diffusent des informations parlementaires et donnent l'occasion aux citoyens de participer au processus législatif de façon plus éclairée. En outre, ils tiennent une base de données socio-économiques sur la région, régulièrement mise à jour et qui sert à identifier les besoins les plus urgents de la circonscription.

Les centres offrent un lieu de réunion pour le parlementaire et ses électeurs. Etant donné que ces structures appartiennent au parlement, et non aux partis politiques, ils permettent à tous les parlementaires de la région, de quelque bord politique qu'ils soient, de rencontrer leurs électeurs. Installés dans des zones centrales, les PCIC sont facilement accessibles pour la majorité des habitants de la circonscription. En outre, ils sont à proximité des administrations centrales ou locales à des fins de coordination…Chacun d'entre eux est doté d'un administratif salarié par le Parlement, sur contrat.

Les études sur le travail effectué par les permanences montrent que leur efficacité, en tant que canal de communication et de participation des citoyens, dépend de la motivation du parlementaire (voir l'extrait de la réponse zambienne ci-dessus). Il en ressort également que ces permanences servent davantage à enregistrer les doléances et problèmes personnels qu'à communiquer des points de vue sur l'activité législative des parlementaires.

Autres lectures en ligne sur l'organisation des permanences parlementaires :

National Democratic Institute (2002). Constituency handbook for elected representatives in Namibia. <http://www.accessdemocracy.org/library/1376_na_constituencyhdbk.pdf> (document en anglais)

Programme des Nations Unies pour le développement (nd). The legislature and constituency relations. <http://www.undp.org/governance/docs/Parl-Pub-constrelat.htm> (document en anglais)

   Les parlementaires au service du développement local

Dans bien des sociétés en développement, c'est dans les domaines les plus fondamentaux de la vie quotidienne que les administrés souhaitent obtenir l'aide de leurs élus : l'accès à l'eau, les services sanitaires et d'hygiène publique, les installations collectives, les infrastructures de base, etc. Les parlementaires ont là l'occasion d'agir directement et d'aider au lancement de projets de développement dans leur circonscription, et ce de plusieurs façons :

  • en aidant les pouvoirs publics à définir les priorités du développement et à les mettre en œuvre;
  • en aidant les collectivités et les groupements locaux à trouver les financements nécessaires à la réalisation de leurs projets;
  • en collaborant avec les ONG dans le cadre de programmes locaux;
  • le cas échéant, en adressant aux ministères des recommandations relatives aux affectations budgétaires concernant leur district.

Dans certains pays africains, les parlementaires perçoivent au titre des projets locaux des fonds prélevés sur le budget de développement du gouvernement central, qu'ils peuvent utiliser à leur discrétion. En Inde, par exemple, les élus peuvent suggérer que l'on entreprenne des travaux de développement dans leur circonscription, à concurrence de 20 millions de roupies par an; une commission spéciale des deux chambres assure la liaison avec le ministère pertinent pour aider les parlementaires à les mettre en chantier.

   Un signal d'alarme pour l'avenir : la surcharge de courrier électronique

A l'autre extrémité de l'échelle du développement, un problème commence de prendre de l'acuité dans les pays où l'on fait un usage intensif de l'internet : celui de la croissance exponentielle des courriels adressés aux élus et à leurs services. Ce problème préoccupe tout particulièrement le Congrès des Etats-Unis, qui traite de ce sujet dans un rapport des plus intéressants, intitulé : E-mail Overload in Congress (2002, que l'on peut consulter sur le site: http://www.cmfweb.org/index.php?option=com_content&task=view&id=208&Itemid=g). Parmi les problèmes recensés, citons les envois de courriels en rafale chaque fois que le public prend connaissance d'une question prêtant à controverse, mais qui ne s'en trouve pas réglée pour autant; l'augmentation massive du nombre de messages reçus de l'extérieur du district; la tendance de certaines organisations à se servir du courriel pour faire du lobbying à outrance; le fait que, ce mode de communication étant instantané, les correspondants s'attendent à une réponse immédiate; et l'insuffisance des budgets disponibles, qui ne permettent pas de faire face à une telle surcharge. Voici un extrait de ce rapport :

Si toutes les institutions s'efforcent de parvenir au "monde sans papier" annoncé, le Congrès ne s'en heurte pas moins à d'énormes difficultés, ainsi qu'aux récriminations des usagers. De plus en plus, ceux-ci sont contrariés par ce qu'ils perçoivent comme une absence de réaction du Congrès à leurs messages. Celui-ci, de son côté, est agacé, car il a le sentiment que les usagers ne comprennent pas sa façon de travailler, non plus que les contraintes dans lesquelles il est forcé d'opérer... Jusqu'ici, loin de stimuler la démocratie, comme beaucoup l'espéraient, le courrier électronique a avivé les tensions et provoqué la grogne du public.

Entre autres suggestions, le rapport recommande aux différents services du Congrès d'adopter une stratégie bien définie pour répondre aux messages électroniques reçus, et notamment de se doter d'un logiciel dernier cri permettant de trier et de stocker les courriels et, le cas échéant, d'y répondre automatiquement. Les messages électroniques ne permettent pas seulement de gagner du temps et de l'argent (en économisant du papier et des timbres), ils multiplient les occasions de "s'ouvrir sur l'extérieur" et de nouer des contacts avec les différents groupes d'électeurs intéressés par des sujets particuliers.

Quant aux correspondants, le rapport fait plusieurs recommandations qui s'appliquent également à l'envoi des lettres ordinaires. Pour que le message électronique adressé à un membre du Congrès ait le meilleur impact possible, il importe :

  • qu'il provienne d'un administré qui prendra soin d'indiquer son nom et son adresse;
  • qu'il soit rédigé par le correspondant lui-même, et non copié sur une lettre circulaire ou sur un site Web;
  • qu'il provienne d'une personne physique, non d'une association agissant en qualité d'intermédiaire;
  • qu'il vise un sujet précis et non plusieurs sujets n'ayant rien à voir entre eux;
  • qu'il se présente dans un format facile à lire et expose l'objet de la correspondance dès le premier paragraphe.
Permettre aux citoyens de présenter des doléances

L'une des fonctions importantes du Parlement consiste à établir un cadre permettant aux citoyens de présenter leurs doléances et de faire mener des enquêtes à leur sujet. En général, les citoyens désireux de déposer une plainte contre les pouvoirs publics, ou d'obtenir un recours, le font par le biais de leurs représentants élus. à cet égard, nous avons déjà souligné l'importance de la permanence. à l'évidence, un élu a beaucoup plus de poids qu'un simple particulier lorsqu'il s'agit de porter plainte contre des pouvoirs publics. Les parlements prévoient également une voie d'accès plus générale, celle du droit de pétition et des commissions y afférentes. Ce droit remonte aux origines mêmes des parlements, comme le rappelle une publication récente du NDI intitulée Parliamentary Human Rights Bodies :

Le droit de pétition est au moins aussi ancien que l'institution parlementaire elle-même. D'aucuns soutiennent même que le Parlement du Royaume-Uni est né dans les réunions du Conseil du Roi consacrées aux pétitions. En France, le droit de soumettre des pétitions au Parlement comme voie de recours existe pratiquement sans interruption depuis la Révolution française. Avec l'influence et l'importance croissantes des parlements, ce mode de pétition est devenu l'un des principaux moyens de recours, au point que les parlements ont dû créer des commissions spéciales chargées de traiter les pétitions de plus en plus nombreuses. Ces organes peuvent être considérés comme les premières commissions des "droits de l'homme", leur objectif de toujours étant de réparer les injustices (Ingeborg Schwarz, Parliamentary Human Rights Mechanisms, NDI, 2004).

De nos jours, ces commissions sont surtout chargées d'examiner des pétitions motivées par un problème d'ordre général et soutenues par un grand nombre de signataires. C'est par exemple le cas au Portugal, où "une pétition est prise en compte lorsqu'elle regroupe plus de 2000 signatures". Dans beaucoup de pays, un système différent a été choisi, les plaintes étant généralement reçues par un Médiateur ou Protecteur public, que celui-ci soit d'abord saisi par un l'entremise d'un membre du Parlement ou, le plus souvent, directement par le plaignant. Mais même dans ce dernier cas, c'est au Parlement qu'il incombe d'établir et de superviser le cadre permettant de protéger les droits du public.

Cette fonction de médiateur ou de protecteur public, née en Scandinavie, est devenue la principale voie de recours pour les particuliers contre les pouvoirs publics. Certes, les compétences du Médiateur diffèrent d'un pays à l'autre, mais ce dernier est généralement chargé d'enquêter sur les actions des pouvoirs publics lorsqu'elles donnent lieu à une violation des droits de l'homme, à un abus de pouvoir ou à d'autres préjudices. Sur réception d'une plainte déposée par un citoyen, le Médiateur est habilité à enquêter et, s'il y a lieu, à demander réparation pour le plaignant et / ou modification de la pratique institutionnelle ayant conduit à la plainte. Dans la plupart des pays, les décisions du Médiateur ne sont pas contraignantes, mais elles ont beaucoup de poids. On estime qu'elles ont l'avantage d'éviter les procès, de proposer un plus large éventail de réparations et de suggérer des modifications utiles aux procédures administratives. Les extraits suivants, provenant d'Irlande et d'Argentine, relatent la création de la fonction de Médiateur dans ces deux pays :

Irlande : Jusqu'aux années 1960, les citoyens recherchant un recours s'adressaient généralement au parlement (ou à sa commission des pétitions) ou bien aux tribunaux. La complexité de l'Etat moderne, le fait que le parlement soit dominé par le gouvernement, les délais et les frais considérables des procédures judiciaires et la méfiance croissante dans laquelle les citoyens tiennent toutes ces institutions, ont conduit à la création dans les années 1960 et 1970 de la fonction de médiateur telle que nous la connaissons aujourd'hui. Elle s'inspire d'une tradition qui existe depuis de nombreuses années en Suède et en Finlande. Le Danemark a été le premier à opter pour cette solution, suivi par la Nouvelle-Zélande, la Grande-Bretagne et l'Irlande du Nord. Le modèle irlandais, tel que défini dans la Loi de 1980 relative au médiateur, a servi de modèle pour ces trois pays…Certes, le nombre des plaintes par an est relativement faible par rapport aux millions de décisions prises chaque année par notre fonction publique, mais les activités du médiateur ont sans aucun doute, un effet dissuasif sur les organismes publics et sont prises en compte dans leurs décisions. (Kevin Murphy, ancien Médiateur).
Argentine : S'inspirant de la remarquable tradition nordique, l'Argentine a institué la fonction de Médiateur responsable devant le parlement national. Le médiateur est chargé de protéger les intérêts des citoyens, de groupes de citoyens et de la communauté en général face à tout acte du gouvernement qui viole les droits fondamentaux des citoyens. D'ores et déjà les résultats sont très prometteurs en Argentine. Par ailleurs, le Médiateur permet aux citoyens de participer davantage au mécanisme de contrôle. Dans certains pays, il est responsable devant l'exécutif. Mais l'expérience montre en Argentine que la majorité des citoyens souhaitent que cette institution soit responsable devant le législatif. (Eduardo Menem, ancien président en exercice du Sénat).

En Amérique Latine, les violations des droits de l'homme étaient si répandues sous les anciens régimes militaires que la création d'une fonction de Protecteur public (ou dans certains pays d'une Commission nationale des droits de l'homme ayant des compétences similaires) a été considérée comme un élément fondamental de la démocratie. Pour beaucoup de commentateurs ces organes doivent présenter les caractéristiques suivantes s'ils veulent être efficaces :

  • Indépendance complète par rapport au gouvernement.
  • Des pouvoirs d'enquête étendus.
  • Des ressources suffisantes et des procédures de saisine gratuites.
  • Ils doivent être d'un accès aisé, du point de vue géographique grâce à des bureaux locaux et aussi par des moyens électroniques.
  • Ils doivent être responsables devant le parlement et lui rendre des comptes.

Dans la plupart des pays qui se sont dotés d'un médiateur ou d'une institution équivalente, ce dernier est responsable devant le parlement dans son ensemble ou doit rendre des comptes à une commission spéciale. A Malte, le médiateur est l'un des responsables du parlement auquel il rend des comptes par le biais du président. En Ukraine, le Commissaire parlementaire (Médiateur) pour les droits de l'homme est responsable devant l'ensemble du parlement pour ce qui est du respect des droits de l'homme dans le pays. Il travaille en étroite collaboration avec certaines commissions parlementaires, en fonction de la nature des plaintes ou des saisines. Son champ d'action s'étend aux droits économiques, sociaux et civils. On en trouve un exemple dans le rapport de ce médiateur au terme de sa première année de fonction :

En 1998, la Commissaire et la Commission parlementaire chargée des questions de santé publique, de la Mère et de l'Enfant ont été saisies par de nombreux employés d'établissements médicaux se plaignant des réductions excessives du personnel et des moyens mis à la disposition du réseau de santé. Après examen des plaintes, la Commissaire et la Commission ont conclu que ces réductions menaçaient de détruire le secteur de la santé et de porter atteinte aux droits des nombreuses personnes qui y travaillent. En conséquence, elles ont adressé une lettre ouverte au Président du parlement et au Premier ministre d'Ukraine et ont tenu des réunions avec le syndicat des travailleurs médicaux. Le Ministre de la santé a finalement pris les mesures nécessaires en vu de régler le problème.

En Namibie, le médiateur est responsable devant une Commission permanente spéciale du parlement, chargée, entre autres, de ce qui suit :

  • Examiner les rapports, annuels et autres, soumis à l'Assemblée nationale aux termes de la Loi relative au médiateur et soumettre des rapports y afférents.
  • Vérifier que les services du médiateur remplissent correctement et efficacement leurs fonctions et faire des recommandations à cette fin.
  • Confirmer que les administrations, ministères et agences publiques donnent suite aux demandes d'information et coopèrent comme il se doit avec les services du médiateur.

   Commission parlementaire des droits de l'homme

Dans d'autres pays, le médiateur ou équivalent est responsable devant une commission parlementaire des droits de l'homme dont les compétences en matière de protection et de promotion des droits fondamentaux s'étendent à l'ensemble du pays. Aux Philippines, la Commission des droits de l'homme de la Chambre des Représentants a créé des centres de documentation (HRRC) sur les droits de l'homme au sein de tous les gouvernements locaux du pays :

Le besoin s'en était fait sentir dans le contexte de la résistance armée et des manifestations contre les violations de plus en plus fréquentes des droits de l'homme. Une fois créé, le HRRC fait partie d'un réseau qui veille à la bonne gouvernance en matière de droits de l'homme. Par des activités de sensibilisation, le réseau enrôle écoles et universités, ainsi que les écoles militaires et de police.

Au Brésil, la Commission parlementaire des droits de l'homme qui reçoit elle-même les plaintes en cas d'abus et lance des enquêtes, constitue le principal organe de contrôle du respect des droits de l'homme. Etant donné que le Brésil est un Etat fédéral, le gouvernement central n'a que peu de pouvoir sur les Etats fédérés. Il incombe donc à la Commission des droits de l'homme de faire connaître, en collaboration avec les médias et la société civile, les abus commis dans les diverses régions et d'exercer des pressions sur les autorités concernées pour y remédier. Dans certains cas, son action vise à inciter le parlement fédéral lui-même à adopter des lois, comme l'explique l'un de ses membres :

Nous avons également mis en place un système dit "de caravane des droits de l'homme". L'objectif est de susciter des débats dans les Etats fédérés, au niveau de la Fédération et de la société dans son ensemble sur certaines questions de droits de l'homme. Ainsi, pendant une dizaine d'année un projet de loi relatif aux établissements pour malades mentaux est resté en souffrance devant le Congrès national, attendant un vote. Nous avons donc organisé des caravanes des droits de l'homme dans tout le pays afin de sensibiliser la population à la situation de ces établissements, à la condition réelle des personnes qui y sont détenues, aux violations des droits de l'homme dont elles étaient victimes et au fait qu'elles ne bénéficiaient pas des normes minimales de séjour. Les tournées des caravanes, largement couvertes par les médias, ont mobilisé les citoyens, révoltés par cet état de chose. Nous avons finalement réussi à faire adopter la loi après dix ans de débats. Nous avons agi de même pour les maisons de retraite.

Comme on le voit, une commission peut obliger, en agissant de concert avec la société civile, le parlement à prendre ses responsabilités en matière de droits de l'homme. Comme l'a montré l'UIP dans une enquête récente sur les organes parlementaires des droits de l'homme, la défense des droits fondamentaux de la population est désormais un élément central de toutes les activités parlementaires; cette protection couvre toutes les personnes vivant sur le territoire national, et non les seules personnes pouvant se prévaloir du statut de citoyen :

Tout d'abord, les parlements légifèrent et déterminent le cadre juridique des droits de l'homme au niveau national. Ils ratifient les traités internationaux et veillent à ce que les normes fixées par ces traités soient inscrites dans les lois nationales et respectées. Ensuite, les parlements approuvent le budget et, partant, fixent les priorités nationales. Il leur appartient donc de s'assurer que des fonds suffisants sont consacrés au respect des droits de l'homme et que ces fonds soient employés comme il convient. En troisième lieu, les parlements contrôlent l'action de l'exécutif et doivent donc examiner continuellement les politiques et décisions du gouvernement. Ils sont en mesure, par conséquent, de veiller à ce que le gouvernement, l'administration et les autres services de l'Etat respectent les obligations en matière de droits de l'homme. Enfin, et c'est très important, les parlementaires façonnent l'opinion et peuvent contribuer grandement à l'instauration d'une culture des droits de l'homme dans leur pays.

Autres lectures en ligne sur la fonction de Médiateur :

Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (2003). Recommandation 1615 (2003): l'institution du médiateur. <http://assembly.coe.int/Documents/AdoptedText/ta03/FREC1615.htm>

Christopoulos, D; Hormovitis, D (ed.) (2003). The ombudsman institution in south-eastern Europe. <http://unpan1.un.org/intradoc/groups/public/documents/untc/unpan014896.pdf> (document en anglais)

National Democratic Institute (2005). The role and effectiveness of the ombudsman institution. <http://www.accessdemocracy.org/library/1904_gov_ombudsman_080105.pdf> (document en anglais)

Ombudsman Information Network (2005). European countries' ombudsmen. <http://www.anticorruption.bg/ombudsman/eng/readnews.php?id=2901&lang=en&t_style=tex&l_style=default> (document en anglais)

Autres lectures en ligne sur les commissions parlementaires des droits de l'homme :

National Democratic Institute (2004). Parliamentary human rights committees. <http://www.accessdemocracy.org/library/1905_gov_parlhrscommittees_080105.pdf> (document en anglais)

Union interparlementaire (2004). Renforcer le parlement en tant que gardien des droits de l'homme : rôle des instances parlementaires des droits de l'homme. Séminaire a l'intention des présidents et membres des instances parlementaires des droits de l'homme <http://www.ipu.org/splz-f/hr04.htm>

Union interparlementaire (2006). Base de données Parline : instances parlementaires spécialisées. <http://www.ipu.org/parline-f/Instanceadvanced.asp>

Participation des citoyens au processus législatif

La présente section traite de la participation directe des citoyens au travail législatif, qui prend diverses formes. Le plus souvent, les parlementaires invitent les citoyens à faire part de leurs opinions ou à déposer des témoignages devant une commission législative. L'organisation d'auditions publiques aux fins de sonder l'opinion des parties prenantes sur les lois en préparation était de tradition dans les anciens parlements. Cette pratique devient aujourd'hui plus généralisée et plus systématique.

   Saisine des commissions et auditions publiques

Comme point de départ, il nous a semblé opportun de citer cet extrait d'un guide du parlement néo-zélandais, expliquant à quel point la participation citoyenne directe au travail législatif est importante pour la démocratie :

Le système néo-zélandais de démocratie parlementaire permet non seulement aux citoyens d'élire leurs représentants, mais aussi d'intervenir dans l'élaboration des lois qui régissent leur vie. Cette participation se fait par le biais des commissions de la Chambre des représentants, qui reçoivent les plaintes et propositions des citoyens. Ce système de contribution aux projets de loi est un élément important du processus parlementaire et de la vie démocratique du pays. Les citoyens sont également entendus sur les enquêtes parlementaires et d'autres questions soumises à une commission. Ainsi les citoyens ont la possibilité de faire part de leurs points de vue sur toutes sortes de questions et de susciter éventuellement de nouveaux textes de loi.

On peut organiser ce processus d'engagement civique de diverses manières. Pour sa part, le parlement néo-zélandais invite en continu toutes les parties concernées, simples particuliers ou personnes morales, à faire des propositions dans la presse et les autres médias, y compris sur le site web du parlement. D'autres parlements considèrent les associations civiques ou les ONG spécialisées dans des questions ou des domaines spécifiques comme les structures les plus aptes à transmettre les points de vue de la société civile. C'est la raison pour laquelle ils invitent tout particulièrement les organisations censées être concernées par un texte de loi donné ou par une enquête en cours à faire des propositions. C'est la méthode choisie par le Parlement turc lorsqu'il a mené en 2004 des consultations à grande échelle sur la révision du code pénal. En règle générale, le parlement de la République tchèque organise "des auditions publiques de représentants des secteurs professionnel et civique" concernés par les projets de loi. L'ex-République yougoslave de Macédoine s'est dotée d'un bureau de contact pour les ONG au parlement afin de promouvoir la participation des citoyens au travail législatif, un service qui permet également de vérifier la représentativité et le statut des associations civiques. D'autres parlements encore tiennent des registres officiels des ONG et autres groupes intéressés dans le même but, mais aussi pour veiller à ce que les groupes marginalisés soient effectivement pris en compte dans les procédures consultatives. Tous ces dispositifs peuvent aussi prendre une forme plus institutionnelle. Les parlements du Bélarus, de Slovénie et de Tunisie ont créé des conseils consultatifs de représentants des ONG et d'autres experts attachés à certaines commissions permanentes. La Lettonie et le Mali ont lancé une coopération permanente avec les parties prenantes en vue d'améliorer le travail législatif. La Hongrie a ouvert un Bureau civil à l'Assemblée nationale, en 2002, chargé d'instaurer un dialogue entre les citoyens et l'Assemblée dans le cadre du processus législatif.

Le Parlement islandais a choisi d'agir sur deux fronts, sollicitant des propositions aussi bien de la part de personnes morales concernées que des citoyens :

Désormais les commissions législatives permanentes de l'Althingi, le Parlement islandais, demandent régulièrement à tous ceux qui sont concernés par les projets de loi en cours d'examen, de faire connaître par écrit leurs opinions. Par "personnes concernées", on entend les groupes d'intérêt et autres organisations non gouvernementales et associations. Le parlement estime, en effet, que tous ceux qui sont affectés par une loi ont le droit démocratique d'être entendus et consultés. En outre, n'importe quel citoyen peut s'adresser directement aux commissions permanentes, en ce sens que chacun est en droit d'envoyer un avis, par écrit, auxdites commissions (par courrier normal ou courriel) sur tout projet de loi en cours d'examen. Ces opinions "spontanées", puisqu'elles ne sont pas officiellement sollicitées par les commissions, contrairement aux opinions évoquées ci-dessus, sont communiquées aux membres des commissions. Ajoutons que toute opinion portée à la connaissance des commissions est également rendue publique … et on est en train d'étudier la possibilité de publier ces documents aussitôt qu'ils parviennent aux commissions concernées.

Le Parlement de la République de Moldova publie ses plus importants projets de loi sur son site web pour associer la société civile au débat :

Ainsi, c'est précisément de cette manière que les avis et les propositions de citoyens ordinaires et de représentants des organisations non gouvernementales ont été sollicités dans le processus d'examen et d'adoption de la loi sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales et sur le statut juridique de leurs organisations, de la loi sur la protection des consommateurs; de la loi sur l'approbation de la politique nationale de la République de Moldova et d'autres lois.

   Quelques questions préoccupantes

Les extraits ci-dessus se rapportent à des sujets de préoccupation fréquemment évoqués, liés à la participation des organisations civiques et des ONG au processus législatif. L'une d'entre elles a trait à la question de savoir dans quelle mesure elles sont véritablement représentatives d'une circonscription donnée ou des intérêts sociaux de la population. Autre sujet de questionnement : ces organisations sont-elles vraiment indépendantes et capables de s'autogérer, ou bien sont-elles téléguidées et financées par le gouvernement ? Une troisième interrogation, enfin, a trait à l'influence respective des différentes organisations, d'aucuns craignant que certaines d'entre elles, puissantes et largement financées, puissent avoir trop d'influence sur le processus législatif.

Ces préoccupations montrent bien qu'il faut que le Parlement légifère pour établir un cadre transparent, propice au bon fonctionnement des organisations de la société civile : en encourageant, par exemple, le secteur du bénévolat et des activités non lucratives; en tenant un registre public de tous les organismes qui pratiquent le lobbying parlementaire (où seraient notamment consignés les noms de leurs membres et leurs sources de revenus. Le Parlement peut également veiller à ce que toutes les communications émanant de la société civile passent par les voies officielles, et à ce que leur contenu soit rendu public. Le Bundestag allemand, par exemple, s'est doté de règles précisant clairement que les groupes qui souhaitent faire valoir ou défendre leurs intérêts devant le Parlement doivent consigner leurs requêtes sur un registre prévu à cet effet. Au moment où le présent guide était en cours d'élaboration, le Parlement polonais était en train d'examiner un projet de loi sur le lobbying, "qu'il définit comme toute activité menée dans le cadre de la loi, en vue d'amener les pouvoirs publics à prendre en considération les arguments et les intérêts de groupes sociaux ou professionnels spécifiques. Ce projet de loi définit les moyens admissibles par lesquels on peut tenter de peser sur les décisions des autorités et il instaure des mécanismes de contrôle du lobbying".

   Aider les citoyens à se faire entendre

Il ne suffit pas d'empêcher les groupes d'intérêts puissants de prendre une place prépondérante, encore faut-il permettre réellement aux citoyens ordinaires de faire entendre leur voix. A cette fin il convient, entre autres, de publier à l'avance les dates des auditions publiques et des réunions des commissions. Il faut aussi conseiller les citoyens sur la manière de s'adresser à la bonne commission, de présenter leur demande afin qu'elle soit prise en considération. L'un des guides publiés par le Parlement néo-zélandais est intitulé Making a Submission to a Parliamentary Select Committee (Comment s'adresser à une commission parlementaire). Cet ouvrage vise à "aider les auteurs d'une demande à la formuler et à la présenter de sorte qu'elle soit aisément lisible et comprise par les membres de la commission. Ainsi les citoyens ont plus de chance de se faire entendre et leurs recommandations ou suggestions ont plus d'impact sur la commission". On trouvera ci-dessous la présentation recommandée (voir encadré) :

Encadré : Extraits du guide 'Comment s'adresser à une commission parlementaire'

Présentation

To the à l'attention de la Commission ……………………………………………………………

Concernant le projet de loi / enquête ……………………………………………………………

Introduction

1. La présente demande est adressée par (nom de la personne/organisation et adresse)

2. Je/Nous souhaitons nous présenter devant la Commission à propos de ma/notre demande. Nous pouvons être contactés au : (numéro de téléphone aux heures ouvrables). Nous vous demandons également de bien vouloir autoriser les personnes suivantes à se présenter avec nous à l'appui de notre demande (Liste des noms et titres)

3. (En cas de personnes morales, décrire brièvement l'objet social, les membres, la structure et citer les personnes consultées lors de la préparation de la demande)

General/Summary (if a long submission)

4. Nous soutenons les dispositions de ce projet de loi pour les raisons suivantes (indiquer les raisons) / nous nous opposons aux dispositions de ce projet de loi pour les raisons suivantes (indiquer les raisons). Nous voudrions faire les commentaires suivants (indications sur l'objet de la demande).

Clause (Projet de loi)

5. Nous soutenons les dispositions de cette clause pour les raisons suivantes (indiquer les raisons) / nous nous opposons aux dispositions de cette clause pour les raisons suivantes (indiquer les raisons).

Clause (Projet de loi)

6. Nous sommes d'accord avec l'objet général de cette clause, mais nous estimons que (indiquer les changements que vous souhaitez apporter. Suggérer une nouvelle formulation pour la clause si vous le souhaitez).

Commentaires (Demande)

7. Nous aimerions soulever les questions suivantes classées sous 1, 2, etc. (exposez vos points de vue et donnez les raisons)

Recommendations

8. (Exposez toutes autres recommandations ou conclusions que vous souhaitez soumettre à la commission. Vous pouvez réitérer des recommandations déjà formulées dans le texte)

Source: Office of the Clerk of the House of Representatives of New Zealand (2005), Making a Submission to a Parliamentary Select Committee. <http://www.parliament.nz/en-NZ/HvYrSay/Submission/> (site en anglais)

Certes, cette présentation est utile mais elle suppose une certaine connaissance du mode de fonctionnement des commissions. A cet égard, la réponse du parlement sud-africain rappelle que les pauvres et les exclus ont le plus grand mal à se faire entendre des législateurs. Voici ce qu'en pense une ancienne présidente de cette institution, Mme Frene Ginwala, citée dans ce document :

En Afrique du Sud, le fossé entre ceux qui, ayant des ressources, peuvent peser sur les décisions du gouvernement, et ceux dont l'influence, pour des raisons historiques, est limitée par la pauvreté et le dénuement, est large et profond. Il y a donc un danger très réel que la voix des puissants soit entendue, alors que le plus grand nombre reste enfermé dans le silence auquel des circonstances historiques l'ont condamné.

Pour ce qui est des demandes adressées aux commissions parlementaires, cette réponse relève plusieurs contraintes :

  • Le temps : Les obligations des plus pauvres étant très nombreuses, ceux-ci ne peuvent participer à aucune activité autre que celles nécessaires à leur survie et à leur subsistance.
  • L'accès aux médias : L'accès aux médias est l'une des conditions nécessaires à la participation à la vie publique. La partie de la population qui en est exclue est généralement pauvre, rurale et africaine, peu éduquée.
  • Le manque de moyens de transport : Il n'est pas toujours facile pour cette partie de la population de payer les frais de transport nécessaires à une visite au parlement.
  • De fortes inégalités en matière d'éducation : L'autre condition pour une citoyenneté informée et active est une population alphabétisée.
  • La diversité linguistique : Le choix de la langue officielle et la simplicité ont la plus grande importance. D'eux dépend l'aptitude des citoyens à obtenir l'information et à participer à la vie publique.

Plusieurs moyens permettent d'amoindrir les difficultés, comme la distribution de ressources aux groupes exclus afin qu'ils puissent faire entendre leurs opinions et assister aux auditions ; la tenue de réunions de commissions dans les provinces et l'institution d'une assemblée du peuple (voir ci-dessous). Cette réponse au questionnaire admet que de telles solutions sont très coûteuses et que les inégalités en termes d'influences restent importantes.

D'autres pays ont choisi d'organiser des auditions publiques sur les projets de lois dans toutes les localités, en veillant à ce que les débats restent informels et que les témoignages soient donnés oralement, quitte à les compiler par la suite pour les transmettre aux commissions parlementaires concernées. Pour promouvoir la participation citoyenne, la Chambre des représentants des Philippines organise "des auditions publiques en province, jusque dans les communes les plus reculées, faisant en sorte que toutes les circonscriptions, tous les secteurs et groupes d'intérêt, aient la possibilité de se faire entendre et de donner leur avis sur les questions législatives". L'Assemblée nationale de Saint-Kitts met les projets de loi à la disposition du public pour permettre aux citoyens de les examiner et de les commenter après leur première lecture, de sorte que l'opinion de la population soit prise en compte lors des seconde et troisième lectures :

Ce fut notamment le cas pour le projet de loi adopté en 2005 et dont la première lecture remonte à 2003. Depuis cette date, de nombreuses réunions ont été tenues dans les mairies et le projet de loi a fait l'objet d'un débat intense dans les radios. Une commission a été chargée de rendre compte de tous ces débats et réunions au parlement. Une fois ce rapport soumis, le projet de loi est passé en seconde et troisième lectures, en tenant compte des commentaires de la société civile.

Le plus remarquable est que cette commission a organisé un processus de débat public sur les rémunérations des parlementaires, avec des réunions publiques, des débats radiophoniques où les citoyens pouvaient téléphoner pour donner leur avis.

   Un forum ou une enceinte publique

Dans certains pays la participation de la société civile au travail parlementaire prend la forme d'un forum ou d'une enceinte publique organisée, comme au Liban et en Fédération de Russie :

République libanaise : Le Forum du dialogue parlementaire a été créé en 1999 pour promouvoir la communication entre le parlement libanais et les organisations de la société civile et encourager la participation de ces organisations à la définition des politiques du pays. Ce forum, considéré comme une organisation non gouvernementale, vise à transmettre les points de vue, aspirations et propositions de la société civile au parlement. Voici ses principaux objectifs : réunir des informations, pour les parlementaires, sur les programmes des ONG, organiser des activités conjointes pour les commissions mixtes du Parlement et les organisations de la société civile et permettre à ces dernières d'accéder aux publications et aux travaux du parlement …Il organise également des ateliers de travail et des stages à l'intention des parlementaires, secrétaires de commission, experts, représentants de la société civile, chercheurs et journalistes, concernés par la définition des politiques au Liban et par la participation des citoyens à la formulation des politiques.
Fédération de Russie : La loi la plus importante visant à promouvoir la démocratie en Russie et à renforcer le rôle du Parlement est, sans doute, la Loi fédérale "sur la Chambre publique de la Fédération de Russie" dont l'initiative revient au Président de la Fédération de Russie et qui a été adoptée par la Douma d'Etat, en troisième lecture, le 18 mars 2005 ……En sa qualité d'intermédiaire entre la société et l'administration, cette Chambre publique sera constituée de la plus vaste gamme possible d'organisations de la société civile, son but étant d'évaluer l'intérêt de la société pour les différentes initiatives législatives …Instituée pour une durée de deux ans, la Chambre effectuera des analyses des projets de lois constitutionnelles fédérales, de lois fédérales, d'actes juridiques normatifs pris par l'exécutif fédéral, par des administrations de région de la Fédération de Russie ainsi que par des organes de gouvernement local. Ses compétences lui permettront aussi d'évaluer les initiatives provenant de toute la Russie et concernant les lois constitutionnelles, de manière à protéger la liberté et les intérêts légitimes des citoyens et de leurs associations. La Chambre publique émettra des recommandations, des conclusions et des propositions.

L'Assemblée du peuple est une institution aux objectifs similaires, même si elle se réunit en général une seule fois par an. En Afrique du Sud, la première assemblée de ce type a été convoquée en 2004 pour marquer le dixième anniversaire de la démocratie. Les représentants invités, au nombre de 60, provenaient de 5 secteurs : les jeunes, les handicapés, les femmes, les bénéficiaires de la réforme agraire et des personnes du monde du travail. Ils ont pu réfléchir sur l'impact que le Bill of Rights et la Constitution ont eu sur leur vie, et à la manière d'accélérer les réformes dans leurs secteurs respectifs. Les délibérations, retransmises en direct, ont incité le parlement à organiser une telle assemblée chaque année.

   Éléments permettant de renforcer la participation des citoyens

De toutes les recommandations ci-dessus, on peut dresser, à l'intention des parlements, une liste des éléments permettant de renforcer la participation des citoyens, personnes morales ou physiques, au travail législatif et autres activités des commissions :

  • Un registre public des ONG et autres associations, regroupées par domaine d'intérêt mais aussi par ordre alphabétique.
  • Un registre similaire des experts.
  • Publication efficace, dans les divers médias, des dates et heures d'examen des projets de loi, enquêtes, auditions publiques, etc.
  • nviter les organisations et experts concernés, notamment les représentants des groupes marginalisés lorsqu'il y a lieu, à faire des propositions ou apporter des témoignages.
  • Procédures de saisine des commissions par les citoyens individuels.
  • Un guide et / ou des stages de formation à la présentation de propositions ou sur la manière de témoigner devant des organes parlementaires.
  • Un registre public, en ligne, de toutes les demandes et propositions faites.
  • Des auditions publiques dans des centres locaux, avec compte rendu écrit des témoignages et dépositions.

Autres lectures en ligne sur les modes de participation de la société civile au processus législatif :

Association des Sénats d'Europe (2002). Le rôle de la société civile dans les parlements des pays européens. Dans Etude de l'influence des sénats sur le développement de la démocratie et le rôle de la société civile. <http://www.senateurope.org/precedentes/ljubljana_2002/analyse_senats_2002.pdf>

Krafchik, W (nd). Can civil society add value to budget decision-making? A description of civil society budget work. International Budget Project <http://www.internationalbudget.org/resources/library/civilsociety.pdf> (document en anglais)

National Democratic Institute, Parliament of the Republic of Namibia (2001). Public participation in the legislation process. <http://www.accessdemocracy.org/library/1408_na_publicpart_093101.pdf> (document en anglais)

The Scottish Office (2000). Involving civil society in the work of parliaments. <http://www.scotland.gov.uk/government/devolution/cpsp-00.asp> (document en anglais)

   Les femmes et le travail législatif : un exemple de coopération entre les ONG et le parlement

Les femmes et les associations féminines sont l'un des meilleurs exemples de coopération entre les ONG et le parlement, surtout dans les pays en développement. Les femmes, en entrant de plus en plus nombreuses au parlement, se servent de leurs contacts avec les ONG féminines pour promouvoir des lois progressistes. Ainsi, dans le cadre de son programme de formation et d'information, le parlement sud-africain organise des ateliers pour les femmes des zones rurales afin de leur expliquer, ainsi qu'aux chefs de communautés locales, le fonctionnement du parlement et le processus législatif. Les séances de travail permettent aussi de recueillir des propositions sur les projets de loi soumis au parlement ainsi que sur la mise en œuvre des lois existantes, notamment sur l'application du Domestic Violence Act (Loi sur les violences domestiques) de 1998 et sur les amendements pouvant être apportés à la Loi relative à la reconnaissance des mariages coutumiers, de la même année. En 2002 le parlement a publié un livret intitulé Women in Lawmaking : A Study of Civil Society Participation (Les Femmes et le travail législatif : étude sur la participation de la société civile), faisant un historique de l'influence que les femmes ont eue sur les lois sud-africaines et indiquant des mesures concrètes leur permettant de participer efficacement au processus législatif.

Certains parlements ont institué des dispositifs institutionnels permanents pour les relations entre les ONG féminines et les commissions parlementaires concernées, telles que les commissions des droits de l'homme, de l'égalité ou des femmes. Au Mexique, un Parlement des femmes mexicaines, constitué de législateurs fédéraux et locaux et de femmes appartenant à la société civile de tout le pays, se réunit une fois par an depuis 1998. Il a pour but de guider le travail législatif sur l'égalité entre hommes et femmes, à tous les niveaux du gouvernement et dans tous les domaines de la vie sociale et économique. Ce parlement n'existe que depuis peu, mais il compte d'importantes réussites à son actif :

Cette expérience de partage des responsabilités entre le Législatif et la société civile a permis de faire avancer la cause de l'égalité entre homme et femmes au Mexique, notamment par des lois réprimant les violences à l'égard des femmes, par la création de commissions de l'équité à la Chambre des représentants et au Sénat et dans la plupart des congrès locaux. Des réformes sont en cours sur l'accession des femmes à des mandats électifs et un Institut national des femmes devrait être créé… Ainsi ce parlement des femmes s'impose comme un pont indispensable entre le Congrès mexicain et la société civile car il permet un échange permanent de points de vue, d'analyses et la formulation de propositions visant à inscrire l'égalité entre hommes et femmes dans les lois du pays.

Au début, les activités du Parlement des femmes étaient effectuées dans le cadre d'ateliers de deux jours, se concluant par une séance plénière. En 2005, il fut décidé de répartir les ateliers sur les cinq Etats du pays et de les porter à quinze jours, avec une séance de clôture de deux jours à la Chambre des représentants. Ses travaux sont coordonnés par une Commission bicamérale spéciale de législateurs provenant des deux chambres du parlement fédéral.

   Des budgets soucieux de l'égalité entre hommes et femmes

La coopération entre les ONG féminines et les parlementaires a permis, dans plusieurs pays, d'aboutir à des 'budgets soucieux d'égalité entre hommes et femmes'. Ce processus budgétaire implique une analyse systématique des propositions et des résultats, de manière à identifier leurs répercussions par sexe. De telles analyses montrent souvent que les femmes sont désavantagées, non seulement par la faiblesse des affectations budgétaires aux questions qui les concernent particulièrement mais aussi par les coupes claires, par exemple dans les dépenses agricoles, qui pénalisent bien davantage les agricultrices pauvres et réduisent leurs revenus.

L'Afrique du Sud a lancé, en 1995, une Initiative budgétaire pour les femmes, fruit de l'alliance entre deux ONG et des parlementaires acquis à cette cause. Les ONG se sont chargées des travaux de recherche et d'analyse nécessaires que le Parlement ne pouvait assurer lui-même faute de moyens, alors que les parlementaires faisaient pression sur les responsables du gouvernement pour que les budgets des divers ministères soient équitables pour les femmes. D'autres pays d'Afrique sub-saharienne ont adopté ce type de budget, notamment la République-Unie de Tanzanie et l'Ouganda, veillant à ce que les prestations de services financées par des fonds nationaux respectent l'équité au niveau local. Dans l'ensemble, cette expérience montre que des budgets équitables pour les femmes servent aussi les hommes, par exemple, en faisant la chasse aux gaspillages et en repérant les lacunes dans les pouvoirs et procédures parlementaires en matière de contrôle budgétaire. Actuellement, une vingtaine de pays en développement et beaucoup de pays développés se sont dotés de programmes permanents de budgétisation respectant l'égalité entre hommes et femmes. La difficulté est de préserver l'élan initial, surtout lorsque l'intérêt du parlement faiblit suite au départ d'un ou deux parlementaires particulièrement motivés.

Autres lectures en ligne sur les programmes internationaux de collaboration et de formation sur l'équité entre hommes et femmes dans les budgets :

Gender Responsive Budget Initiatives <http://www.gender-budgets.org> (site en anglais)

International Budget Project (2006). Related web sites - by topic area: gender, youth, and development. <http://www.internationalbudget.org/resources/sites/gender_youth.htm> (site en anglais)

Union interparlementaire, Programme des Nations Unies pour le développement, Institut de la Banque mondiale & Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (2004). Guide parlementaire : Parlement, budget et genre. <http://www.ipu.org/PDF/publications/budget_fr.pdf>

Pour les rapports sur les séminaires régionaux relatifs à l'équité entre hommes et femmes dans les budgets et au parlement, organisés par l'UIP :

Union interparlementaire (2000). Regional seminar for English-speaking African Parliaments, 22-24 May 2000, Nairobi (Kenya). <http://www.ipu.org/pdf/publications/nairobi_en.pdf> (document en anglais)

Union interparlementaire (2001). Seminaire regional pour les parlements francophones d'afrique, 1er-3 novembre 2001, Bamako (Mali). <http://www.ipu.org/pdf/publications/mali01_fr.pdf>

Union interparlementaire (2002). Regional seminar for ASEAN+3 parliaments, 23 to 25 July 2002, Manila (Philippines). <http://www.ipu.org/PDF/publications/manila02_en.pdf> (document en anglais)

Union interparlementaire (2004). Regional seminar for parliaments of south-west Asia, 26 to 28 May 2003, Colombo (Sri Lanka). <http://www.ipu.org/PDF/publications/colombo_en.pdf> (document en anglais)

   Participation des citoyens par le truchement des partis politiques

L'intérêt du monde contemporain pour la société civile et les ONG ne doit pas nous faire oublier la façon traditionnelle dont les citoyens ont jusqu'ici participé à la vie politique : l'appartenance à un parti. Comme membres d'un parti, leur influence s'exerçait de diverses façons : par le choix de candidats ou lors de l'élection des cadres du parti, en nouant de relations avec le représentant local ou de district, ou en assistant à des conférences ou assises régionales ou nationales du parti.

Dans la plupart des démocraties occidentales, toutefois, le nombre de ceux qui s'inscrivent à un parti politique régresse; on peut souvent y voir l'effet de l'érosion de la démocratie au sein même des partis, qui se traduit par la marginalisation de ceux qui n'épousent pas la ligne officielle des dirigeants. Les partis politiques ont toujours été contraints de gérer la fracture idéologique potentielle entre leurs membres actifs et les électeurs dont l'appui leur est indispensable pour remporter les élections, mais dans bien des cas, leur façon de s'y prendre a découragé les inscriptions, surtout dans la jeune génération. Dans le monde entier, les exemples de partis politiques ayant su se renouveler se limitent à un ou deux pays par région, le plus souvent à l'occasion d'une campagne ponctuelle; mais vu son importance pour le processus de représentation, force est bien de constater que le renouvellement généralisé et pérenne de la base démocratique des partis politiques se fait encore attendre.

   Initiatives citoyennes et référendums

Toujours pour rapprocher le parlement des citoyens, beaucoup de pays ont donné à ces derniers le droit d'initiative ou envisagent de le faire. Ainsi les citoyens peuvent-ils proposer eux-mêmes, directement, des projets de loi et pas simplement des modifications ou des opinions sur des textes déjà soumis au parlement. A certains égards, la distinction implicite ici entre participation des citoyens sous forme de la prise d'initiative, d'un coté, ou de réaction à des propositions, de l'autre, est peut-être exagérée. Comme nous l'avons vu, chaque fois qu'un pays prend des dispositions pour rapprocher le parlement des groupes de la société civile, ces dispositions aboutissent toujours à des suggestions de nouveaux projets de loi ou à des modifications de lois existantes, qui doivent donc être considérées comme une forme 'd'initiative' civique. Il en va de même lorsque les parlements organisent un débat public sur un sujet ou lancent des enquêtes sur des questions particulières en vue d'élaborer une loi, pratique finalement assez courante. Il est vrai, cependant, que les initiatives citoyennes constituent un droit particulier et que leur mise en œuvre nécessite d'ordinaire un nombre minimum de signatures d'électeurs.

Une initiative de citoyens peut avoir valeur consultative ou contraignante pour le parlement ; ailleurs, elle peut conduire à un référendum populaire. C'est notamment le cas de la Suisse, pays le plus connu pour les initiatives citoyennes. Avant les années 1970, ce droit n'était que rarement exercé en Suisse, si on le compare au droit de référendum négatif, ou veto, permettant de s'opposer à un projet de loi de l'Assemblée fédérale. Depuis, les initiatives sont devenues beaucoup plus fréquentes, suite à la multiplication des mouvements sociaux et des campagnes de protestation surtout sur les mouvements de défense de l'environnement et des consommateurs. La montée des initiatives de citoyens s'explique aussi par l'apparition de professionnels, capables d'organiser la collecte de signatures aux quatre coins du pays. De 1974 à 1993, soit en moins de vingt ans, pas moins de 167 référendums ont été organisés en Suisse, dont 63 sur des initiatives positives proposées par des groupes de citoyens. Cette moyenne de huit consultations par an environ n'a pas régressé depuis.

L'autre pays européen coutumier des référendums législatifs est l'Italie. Avec une nuance, cependant, puisque l'article 75 de la constitution n'autorise que les référendums portant veto ou abrogation et sous réserve d'un seuil minimum de 500 000 signatures et d'approbation par la Cour constitutionnelle. Pourtant, même ainsi encadré, ce droit peut apparaître comme une possibilité d'initiative positive. Il s'applique en effet aux lois existantes, mais lorsqu'on abroge une loi ancienne, en tout ou partie, on peut aussi amener un changement important. C'était notamment le cas du référendum portant sur l'autorisation de la procréation assistée, et même d'un autre référendum proposé sur le retrait de l'Italie de la zone euro et le rétablissement de la lire comme devise nationale.

   Faits nouveaux les plus récents

Dans les démocraties les plus récentes, le Parlement slovène s'est doté d'un mécanisme permettant d'organiser un référendum sur demande d'un tiers des membres du Conseil national ou de 40 000 électeurs. Dans d'autres pays, le parlement n'est pas autorisé à adopter une loi si un référendum est en cours. Dans d'autres encore, un référendum suffit à annuler un projet de loi adopté, comme en Italie et en Suisse.

De telles dispositions constitutionnelles doivent être clairement distinguées de celles donnant aux citoyens le droit d'initiative en vue d'inscrire des questions à l'ordre du jour des parlements, ces derniers se réservant le droit de débattre ou non de ces questions. C'est le cas de la plupart des pays ayant adopté le droit d'initiative des citoyens. Le seuil minimum nécessaire aux initiatives y est généralement plus faible que le seuil requis pour les référendums. Ainsi, dans l'ex-République yougoslave de Macédoine, il faut 150 000 signatures en cas de référendum, mais seulement 10 000 pour une proposition de loi, le parlement décidant alors de la suite à y donner. Le Costa Rica a mis en place un Bureau des initiatives populaires pour recueillir les suggestions, initiatives et propositions de loi des citoyens. En Equateur, les citoyens et les associations ont le pouvoir de proposer des lois et de participer au débat sur les projets de loi que le Congrès national a accepté d'examiner. Les Portugais peuvent, depuis 2003, date à laquelle ils ont obtenu le droit d'Initiative législative citoyenne, contraindre l'Assemblée de la République à débattre et à se prononcer sur les propositions ayant recueilli plus de 35 000 signatures. Le débat est, par ailleurs, ouvert à l'ensemble de la population grâce à une page interactive créée par l'Assemblée sur l'Internet. La Chambre des représentants du Parlement néerlandais a envisagé d'accorder aux citoyens le droit d'initiative au niveau national, mais en se réservant la possibilité de donner suite ou non. Cette assemblée observe que 'ce droit d'initiative citoyenne peut avoir de nombreuses répercussions bénéfiques… notamment en rapprochant les citoyens de la politique'.

   Démocratie directe et démocratie représentative

Ce souci de combler le fossé entre les citoyens et la politique est, en définitive, la principale motivation des mesures décrites dans le présent chapitre. Nous avons exposé les diverses manières dont les parlements s'efforcent de faire participer les citoyens au processus législatif, de solliciter leur contribution aux délibérations sur les projets de loi, de les inviter à proposer des lois ou à modifier les textes existants. Rappelons les principales méthodes : invitation ouverte aux citoyens et, dans certains cas, aux ONG et associations spécialisées, à donner leur avis sur les projets de loi ; mécanismes de collaboration permanents entre les commissions parlementaires et des groupes de citoyens et d'experts ; forums ou chambres spéciaux pour la société civile, siégeant indépendamment ou avec des parlementaires ; procédures pour les initiatives de citoyens et référendums ; ou combinaison de plusieurs de ces méthodes à la fois. Laquelle de ces méthodes ou combinaison de méthodes est la plus appropriée ? Cela dépend, bien entendu, des circonstances locales. Par exemple, un manque de ressources ou d'autres contraintes empêchent dans certains cas la tenue d'un référendum, mais nullement le droit d'initiative citoyenne, laissant la décision finale au parlement. Quel que soit le mode retenu, tout indique que les parlements sont soucieux d'associer étroitement les citoyens au processus législatif.

Ces faits récents remettent-ils en question l'intégrité de la démocratie représentative, ou la prétention des représentants élus de parler au nom de leur électorat tout entier - par opposition à la démocratie directe, qui semble favoriser ceux qui savent s'organiser et se faire entendre et ceux qui défendent des positions extrêmes ? L'antinomie souvent soulignée entre démocratie directe et démocratie représentative induit en erreur, vu que les représentants sont engagés dans un dialogue permanent avec leurs électeurs, qui les influencent en retour. Ce qu'il faut principalement retenir des mesures ci-dessus, c'est la volonté de rendre le processus plus systématique, plus transparent et plus exhaustif, de manière qu'il ne soit pas monopolisé par un petit nombre d'intérêts privilégiés opérant à l'abri des regards du public.

Autres lectures en ligne sur les initiatives de citoyens :

C2D - Centre d'études et de documentation sur la démocratie directe <http://c2d.unige.ch/?lang=fr>

Project ACE (2004). Citizen initiatives. Focus on Direct Democracy <http://aceproject.org/ace-en/focus/direct-democracy> (document en anglais)

Zimmerman, J (2000). Initiatives du public. Projet Administration et coût des élections <http://www.aceproject.org/main/francais/es/esc01b.htm>

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