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Union interparlementaire  
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REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
CAS N° DRC/32 - PIERRE JACQUES CHALUPA

Résolution adoptée à l'unanimité par le Conseil directeur
à sa 194ème session (Genève, 20 mars 2014)

Le Conseil directeur de l'Union interparlementaire,

se référant au cas de M. Pierre Jacques Chalupa, ancien membre de l’Assemblée nationale de la République démocratique du Congo, et à la résolution qu’il a adoptée à sa 193ème session (octobre 2013),

se référant à la communication du Président de l’Assemblée nationale du 19 février 2014, aux informations fournies par la délégation de la République démocratique du Congo lors de son audition durant la 130ème Assemblée de l’UIP (Genève, mars 2014), ainsi qu’aux informations transmises par les sources,

se référant également au rapport de la mission en République démocratique du Congo du 10 au 14 juin 2013 (CL/193/11b)-R.2),

rappelant que M. Chalupa, ancien partisan de la majorité ayant rallié l’opposition aux dernières élections, a été : i) arrêté le 2 février 2012 par des militaires de la Présidence, après avoir reçu un faux rendez-vous téléphonique, en pleine période de proclamation des résultats électoraux – par ailleurs fortement contestés; ii) accusé d’avoir obtenu sa nationalité congolaise frauduleusement et poursuivi pour faux et usage de faux; iii) maintenu en détention provisoire puis condamné à trois ans d’emprisonnement,

rappelant également qu’il a constaté que la procédure judiciaire avait été entachée d’irrégularités; que beaucoup d’éléments versés au dossier en trahissaient le caractère politique et qu’il ne pouvait exclure que les poursuites judiciaires engagées contre M. Chalupa avaient pour objet de l’évincer de la vie politique, suite à son ralliement à l’opposition,

considérant que les autorités congolaises ont organisé du 7 septembre au 5 octobre 2013 des concertations nationales afin notamment de consolider la cohésion nationale; que le Chef de l’Etat a présenté les recommandations du rapport final de ces concertations aux deux chambres du parlement le 23 octobre 2013 et a mis en place un comité national de suivi chargé de leur mise en œuvre; que le rapport final recommande que, "dans le cadre des mesures de décrispation politique annoncées par le Président de la République, les pouvoirs publics puissent : accorder, selon le cas, la grâce présidentielle, la libération conditionnelle et/ou l’amnistie au bénéfice notamment (...) [de] Chalupa (...)"; qu’en application de cette recommandation, un décret de grâce présidentielle a été adopté le 23 octobre 2013 et que M. Chalupa a été remis en liberté le 22 novembre 2013 après avoir purgé plus de la moitié de sa peine,

considérant que, s’agissant de la question de la nationalité, M. Chalupa se considère comme Congolais d’origine car né en République démocratique du Congo et n’ayant pas pu bénéficier de la transmission de la nationalité portugaise de son père du fait de la législation portugaise sur la nationalité; que ce cas de figure est prévu par l’article 9(2) de la loi sur la nationalité de 2004 qui reconnaît la nationalité congolaise d’origine par présomption de la loi à "l’enfant né en République démocratique du Congo de parents étrangers dont la nationalité ne se transmet pas à l’enfant du fait de la législation de l’Etat d’origine qui ne reconnaît que le jus soli ou ne reconnaît pas d’effet sur la nationalité à la filiation naturelle",

considérant que la loi organique portugaise N° 2/2006 sur la nationalité ne reconnaît que le jus soli; que son article 1(c) dispose à titre d’exception que "les enfants dont l’un des parents est portugais, s’ils sont nés à l’étranger, pourvu qu’ils déclarent leur volonté d’être portugais, ou déclarent la naissance aux services de l’état civil portugais", peuvent demander la nationalité portugaise; que M. Chalupa affirme que sa naissance n’a pas été déclarée par ses parents au Consulat et qu’il n’a jamais exprimé par écrit aux autorités portugaises sa volonté d’acquérir cette nationalité, ce qui a été officiellement confirmé par les autorités portugaises; qu’en conséquence M. Chalupa ne détient pas la nationalité portugaise et a renoncé explicitement à la possibilité de l’avoir depuis 1992 afin d’obtenir la reconnaissance de sa nationalité congolaise d’origine, qui est une et exclusive en vertu de l’article 10 de la Constitution de la République démocratique du Congo,

considérant que, M. Chalupa ayant été élu député de la République démocratique du Congo et ayant des attaches incontestables de longue date avec ce pays (lieu de naissance, résidence, mariage avec une ressortissante congolaise, etc.), la reconnaissance de sa nationalité ne devrait pas poser de problème juridique, ce d’autant plus qu’elle n’avait jamais fait l’objet de la moindre contestation avant qu’il ne rallie l’opposition politique aux dernières élections législatives,

considérant également ce qui suit : M. Chalupa a introduit une demande de nationalité en 1992; selon la Ministre de la justice, l’attestation acquisitive de nationalité délivrée à M. Chalupa en 2001 (et déclarée frauduleuse par la justice congolaise lors des procédures judiciaires précitées) ne lui avait pas encore conféré la nationalité; un décret du Conseil des Ministres était nécessaire pour finaliser la procédure d’octroi de la nationalité et l’administration congolaise n’avait jamais finalisé cette procédure jusqu’à aujourd’hui; la demande de M. Chalupa peut être traitée par les autorités compétentes, puisque l’article 50 de la loi sur la nationalité dispose que les demandes régulièrement introduites avant son entrée en vigueur demeurent valables,

considérant que, lors de l’audition tenue pendant la 130ème Assemblée, la délégation de la République démocratique du Congo a affirmé que M. Chalupa n’avait pas la nationalité congolaise d’origine car ses parents n’étaient pas de nationalité congolaise, que le droit congolais ne reconnaissait pas le jus soli mais seulement le jus sanguini et qu’en conséquence, la seule option pour M. Chalupa était de solliciter l’acquisition de la nationalité congolaise en introduisant une demande de naturalisation; que la délégation a également indiqué, sans pouvoir le confirmer, que la double nationalité de M. Chalupa serait à l’origine de la situation actuelle et que, compte tenu du principe de séparation des pouvoirs, le parlement ne pouvait intervenir en cette matière qui relève du pouvoir exécutif,

rappelant que le droit à une nationalité est consacré par de nombreux instruments internationaux, dont l’article 24(3) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et l’article 5(d)(iii) de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, instruments ratifiés par la République démocratique du Congo; que, dans sa résolution 20/5 du 16 juillet 2012 sur les droits de l’homme et la privation arbitraire de la nationalité, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a engagé les Etats "à observer des normes de procédure minimales de manière à éliminer tout élément d’arbitraire des décisions touchant à l’acquisition, à la privation ou au changement de nationalité", a réaffirmé que "le droit de chacun à la nationalité est un droit fondamental de l’être humain" et a souligné que "la privation arbitraire de la nationalité, en particulier lorsqu’elle est motivée par des considérations discriminatoires fondées sur (…) les opinions politiques (…) est une violation des droits de l’homme et des libertés fondamentales",

  1. remercie le Président de l’Assemblée nationale et la délégation de la République démocratique du Congo pour les informations fournies;

  2. note avec satisfaction queM. Chalupa a bénéficié d’une grâce présidentielle et a été remis en liberté;

  3. regrette que la question de la privation de sa nationalité n’ait pas été réglée par la mesure de grâce présidentielle et relève avec préoccupation l’absence de progrès sur cette question;

  4. engage les autorités compétentes à prendre dans les meilleurs délais des mesures appropriées pour reconnaître la nationalité congolaise de M. Chalupa, en particulier au regard des dispositions de l’article 9(2) de la loi sur la nationalité; prie les autorités de le tenir informé des progrès accomplis à cet égard;

  5. prie le Secrétaire général de porter la présente résolution à la connaissance des autorités parlementaires et de la Ministre de la justice, ainsi que des sources et de toute tierce partie susceptible de fournir des informations pertinentes;

  6. prie le Comitéde poursuivre l’examen de ce cas et de lui faire rapport en temps utile.
Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 130ème Assemblée et réunions connexes de l'Union interparlementaire" au format PDF (taille du fichier 881 Ko). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement.Get Acrobat Reader

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