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N°37
MARS 2010

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de la Revue

Le Monde des Parliaments
Femmes en politiques

Les femmes au Parlement en 2009 : regard sur l’année écoulée

Une femme votant en Afrique du Sud.

Selon les statistiques préparées par l’UIP, l’année 2009 a vu se poursuivre la progression des femmes au Parlement. La proportion de femmes dans les parlements a atteint un record historique avec une moyenne mondiale de 18,8 %.

En janvier 2010, les présidentes de chambres parlementaires étaient plus nombreuses que jamais. Elles détenaient 35 des 269 fonctions parlementaires suprêmes (soit 13,0 %) dans le monde, ce qui représente un mieux par rapport à 1995 où elles étaient 24 en tout.

Les femmes occupent 30 % et plus des sièges dans 44 chambres parlementaires - 26 chambres basses ou uniques et 18 chambres hautes, soit six fois plus qu’en 1995, ou seules sept chambres avaient atteint cet objectif.

A l’échelle régionale

En 2009, l’Afrique a enregistré des progrès remarquables en matière de représentation des femmes. En moyenne, 29 % des sièges renouvelés dans les 10 chambres concernées ont été obtenus par des femmes, portant ainsi la moyenne globale sur le continent africain à 18,7 % à la fi n 2009. En Afrique du Sud, les femmes ont remporté 43,5 % des sièges lors de l’élection de la chambre basse, ce qui fait de cette chambre la troisième au classement mondial.

L’Europe a continué à enregistrer de bons résultats, puisque les femmes y ont obtenu 26 % des sièges renouvelés en 2009. De même, le continent américain a continué à progresser à un rythme constant, puisque 25 % des sièges sur près de 1 800 soumis à un renouvellement sont échus à des femmes.

Dans la région arabe, les résultats de 2009 ont été mitigés. Pour la première fois, quatre femmes ont été élues au Parlement du Koweït. En revanche, aucune n’a femme n’a été nommée au Conseil consultatif d’Arabie saoudite. Toutefois, les femmes représentent désormais 9,5 % des parlementaires de la région, soit plus du double par rapport à 1995 (4,3 %).

15 années de progrès

Le Programme d’action de Beijing adopté en 1995 à la quatrième Conférence mondiale sur la femme appelait les États à renforcer la participation des femmes à la prise de décisions et au leadership et à faire en sorte qu’elles participent pleinement à la vie politique. A l’époque, les femmes occupaient 11,3 % des sièges parlementaires. Seules sept chambres (soit 3 %) comptaient plus de 30 % de femmes tandis que les deux-tiers des chambres parlementaires comptaient seulement 10 % de femmes, voire moins. S’agissant des postes de responsabilité, 24 femmes étaient présidentes de chambre et seuls 6,4 % des chefs d’État ou de gouvernement étaient des femmes.

Si l’on fait le bilan quinze ans plus tard, le paysage parlementaire a considérablement changé. Chaque année s’achève sur un nouveau record. Fin 2009, la moyenne mondiale de femmes dans les parlements a atteint son record absolu avec 18,8 % - soit près de 75 % de mieux qu’en 1995. Le nombre de chambres à avoir atteint l’objectif de 30 % est à présent de 44 (26 chambres uniques ou chambres basses et 18 chambres hautes), soit 16,7 % du total. A l’autre bout du spectre, le nombre de chambres comptant 10 % de femmes ou moins a diminué de moitié, passant de 141 chambres en 1995, à 71 en 2009 (27,0%).

Néanmoins, il est indéniable que l’émancipation des femmes en politique demeure diffi cile. Plusieurs parlements n’ont jamais compté qu’une poignée de femmes et le nombre de chambres ne comptant pas la moindre femme n’a pas tellement diminué (elles étaient 13 en 1995 et sont encore 10 en 2009). L’augmentation du nombre de femmes aux fonctions dirigeantes a été beaucoup plus lente que dans le reste du Parlement. Malgré une augmentation depuis 1995, où elles étaient 24, on ne dénombre toujours que 35 femmes à la tête de chambres parlementaires.

Comparatif concernant les femmes parlementaires, 1995 et 2009

1995

Vu de d'ensemble

2009

11.3% Proportion de sièges détenus par des femmes toutes chambres confondues 18.8%
7 sur 229 (3,0%)
- 5 chambres uniques ou chambres basses
- 2 chambres hautes
Chambres comptant 30 % de femmes ou plus 44 sur 263 (16,7%)
- 26 chambres uniques ou chambres basses
- 18 chambres hautes
141 sur 229 (61,6%) Chambres comptant 10 % de femmes ou moins 71 sur 263 (27,0%)
13 Chambres ne comptant pas de femmes 10
24 (10,5%) Présidentes de chambre 35 (13,0%)
12 (6,4%) Femmes chef d’État et/ou de gouvernement 16 (8,3%)

Renouvellement des parlements en 2009

En 2009, 54 chambres parlementaires ont été renouvelées dans 48 pays. Les femmes ont remporté 1 886 des 9 143 sièges à pourvoir, soit 20,6 %, comme en 2008. Parmi ces femmes, 1 804 ont été élues au scrutin direct, 70 au scrutin indirect et 12, nommées.

44 chambres franchissent la barre des 30 % de femmes et 11 dépassent les 40 %

La représentation des femmes a augmenté dans 57 % des chambres renouvelées en 2009. Dix chambres ont atteint les 30 % de femmes ou plus avec ces renouvellements, ce qui porte à 44 le nombre de chambres à avoir franchi le seuil critique - soit cinq de plus qu’un an auparavant. Trois chambres ont dépassé les 40 % de femmes - les chambres basses ou uniques de l’Afrique du Sud et de l’Islande et la chambre haute de la Bolivie. Les chambres comptant plus de 30 % de femmes sont diverses et variées.

Elles sont 16 en Europe, 13 sur le continent américain, 11 en Afrique, et quatre dans la région Asie-Pacifi que. La Bolivie et l’Equateur ont fait leur entrée dans ce groupe en 2009 après avoir adopté des quotas électoraux en faveur des femmes assortis de dispositifs contraignants. Plusieurs chambres basses ont pratiquement atteint l’objectif, au Mexique, en Namibie et au Portugal.

Stagnation et reculs dans 40 % des chambres renouvelées en 2009

Si la part globale de sièges occupés par des femmes a augmenté en 2009, lorsque l’on considère les résultats de plus près, il apparaît que ces progressions s’accompagnent aussi de stagnations, voire de reculs dans certains parlements. Dans neuf des chambres renouvelées (soit 17 %), le nombre de femmes est resté inchangé. Pire, des reculs ont été enregistrés dans 14 chambres (26 %) où le nombre de femmes a diminué par rapport au renouvellement précédent.

Trois des renouvellements de 2009 n’ont porté aucune femme à la législature, en Arabie saoudite, aux Comores et dans les États fédérés de Micronésie. Aux Comores, une seule femme a jamais été élue au Parlement. Dans les États fédérés de Micronésie, les seuls du Pacifi que à avoir élu des parlementaires en 2009, aucune femme ne s’est jamais présentée aux élections législatives. De même, il n’y a jamais eu de femme au Conseil consultatif de l’Arabie saoudite, où tous les membres du Conseil sont nommés par le Roi et où le suffrage universel n’existe pas. Cela fait maintenant six ans que 40 % des renouvellements donnent lieu à une stagnation voire un recul de la proportion de femmes.

Les systèmes électoraux ne déterminent pas à eux seuls le degré de représentation des femmes, mais il peut être nécessaire de les modifi er pour la mise en oeuvre de mesures spéciales. Les dispositions électorales en faveur des femmes et la volonté politique au plus haut niveau sont fondamentales pour corriger les déséquilibres constatés dans les parlements du monde entier.

J.B.

Les présidentes de parlement

Au 1er janvier 2010, les femmes occupaient 35 des 269 présidences de chambres parlementaires (13,0 %) dans le monde, le plus grand nombre jamais atteint et pratiquement deux fois plus qu’en 2005, où elles n’étaient que 18. Cette fonction est importante car il s’agit de la plus haute dans la hiérarchie parlementaire. Les femmes se frayent peu à peu un chemin vers ces postes qui étaient traditionnellement réservés aux hommes. Outre qu’ils facilitent les délibérations en structurant les débats entres groupes politiques rivaux, les présidents de chambres sont bien placés pour appeler l’attention, en dehors de la chambre, sur les inégalités entre hommes et femmes et promouvoir les intérêts des femmes.

En 2009, plusieurs pays ont porté pour la première fois une femme à la tête d’une chambre parlementaire : la Bosnie-Herzégovine, le Botswana, la Bulgarie, le Gabon, le Ghana, l’Inde et la Lituanie.

25 présidentes de chambres uniques ou chambres basses de parlement

Albanie (Parlement); Antigua-et-Barbuda (Chambre des représentants); Autriche (Conseil national); Bosnie-Herzégovine (Chambre des peuples); Botswana (Assemblée nationale); Bulgarie (Assemblée nationale); Dominique (Assemblée); Estonie (Parlement); États-Unis d’Amérique (Chambre des représentants); Gambie (Assemblée nationale); Ghana (Parlement); Inde (Chambre du peuple); Islande (Parlement); Lesotho (Assemblée nationale); Lituanie (Parlement); Ouzbékistan (Chambre législative); Pakistan (Assemblée nationale); Pays-Bas (Chambre des représentants); Roumanie (Chambre des députés); Rwanda (Chambre des députés); Sainte-Lucie (Assemblée); Serbie (Assemblée nationale); Suisse (Conseil national); Turkménistan (Assemblée); Venezuela (Assemblée nationale).

11 présidentes de chambres hautes de parlement

Antigua-et-Barbuda (Sénat); Bahamas (Sénat); Belize (Sénat); Gabon (Sénat); Grenade (Sénat); Pays-Bas (Twede Kamer der Staten Generaal), Royaume-Uni (Chambre des Lords); Sainte-Lucie (Sénat); Suisse (Conseil des États); Swaziland (Sénat); Zimbabwe (Sénat).

Fonctions ministérielles

En ce qui concerne les femmes au sein de l’Exécutif et les femmes chef d’État, dans l’ensemble, les progrès sont encore plus lents qu’au Parlement. Comme le montre la Carte mondiale des femmes en politique, il n’y a que neuf femmes sur 151 chefs d’État élus (soit 6 %), en 2010. Elles étaient huit en 2005.

En moyenne, les femmes détiennent 16 % des portefeuilles ministériels. En tout, 30 pays comptent plus de 30 % de femmes au sein de l’Exécutif, à commencer par le Cap- Vert, l’Espagne, la Finlande et la Norvège, où elles représentent plus de 50 % du gouvernement. Inversement, le nombre de pays sans femme au gouvernement a augmenté, passant de 13 en 2008, à 16 en 2010. Les premiers pays concernés sont ceux de la région arabe, des Caraïbes et les îles du Pacifi que.

Par rapport à 2008, on note toutefois une diversifi cation des portefeuilles confi és aux femmes, bien qu’elles détiennent toujours principalement les portefeuilles touchant aux affaires sociales, à l’enfance et à la jeunesse, à la condition de la femme et, de plus en plus, à l’environnement.

J.J.

Trois femmes à la tête de l'État suisse

Mme Pascale Bruderer, Présidente du Conseil national suisseEn politique suisse, l’année 2010 est placée sous le signe des femmes puisque trois d’entre elles occupent les plus hautes fonctions de la Confédération helvétique. Doris Leuthard est en effet Présidente de la Confédération, Pascale Bruderer préside le Conseil national (Chambre basse) et Erika Forster-Vannini est à la tête du Conseil des États (Chambre Haute) de ce pays qui n’a accordé le droit de vote et l’éligibilité à ses citoyennes qu’en 1971, au niveau fédéral, alors que le canton d’Appenzell (Rhodes-Intérieures) ne concédait ce droit à ses habitantes qu’en 1990.

Mme Bruderer présidera également la sixième Réunion des Présidentes de Parlement qui se tiendra à Berne cet été, à la veille de la troisième Conférence mondiale des Présidents de Parlement que l’UIP organisera, du 19 au 21 juillet, au Palais des Nations à Genève.

Si les femmes suisses ne sont entrées que tardivement en politique, elles ont rattrapé leur retard et font désormais entendre leur voix au plus haut niveau des institutions de ce pays multilingue et multiculturel. La présence de Pascale Bruderer (32 ans) à la tête du Conseil national en est un exemple. Lors d’un entretien qu’elle nous a accordé à la Maison des Parlements il y a quelques mois, elle déclarait avoir beaucoup appris de sa rencontre avec les Présidentes de Parlement à Vienne, l’année dernière. « Ces présidentes, venues de divers horizons et de pays développés et en développement, connaissent des situations très différentes».

A Vienne, les Présidentes et Vice-Présidentes de Parlement ont estimé que la violence à l’égard des femmes et des enfants était un sujet qui les interpellait toutes. « Ce que nous pouvons faire, au niveau des parlements, c’est adopter des lois pour une meilleure protection contre la violence, mais cela ne suffit pas. Il faut aussi mettre l’accent sur la prévention, pour que les gens comprennent que ce problème n’est pas seulement une question privée, puisque la violence a lieu aussi bien dans la rue qu’à la maison », résumait Mme Bruderer.

Le Parlement suisse est-il sensible à la question de genre ? « J’aimerais dire oui. C’est vrai dans un certain sens, mais il faut trouver de meilleures solutions. Et si l’on veut changer la réalité, il faut en avoir les moyens ». Pour Pascale Bruderer, un budget sensible « au genre » est une clé et la représentation des femmes au Parlement en est une autre.

De gauche à droite : Mmes Erika Forster-Vannini, Présidente du Conseil des États suisse, Doris Leutard, Présidente de la Confédération helvétique, et Pascale Bruderer, Présidente du Conseil national« Il faut des exemples visibles pour que les jeunes femmes soient motivées et encouragées à s’intéresser aux sujets politiques. L’année 2010 est importante, car la visibilité de femmes à la tête des deux chambres fédérales et à la Présidence de la Confédération montre aux femmes qu’on peut faire bouger les choses en occupant des postes au plus haut niveau de l’État ».

Pascale Bruderer tient à continuer de dialoguer avec les jeunes femmes. « Parfois on pense qu’on ne sera jamais capable de faire de la politique. J’essaie de montrer aux jeunes que faire de la politique n’est pas quelque chose qui est loin des gens, mais que la politique fait partie de notre vie quotidienne et qu’elle peut changer la réalité des citoyens. Le fait de savoir s’il y aura ou non une école dans un quartier est une question politique. Je veux montrer que tout le monde peut s’intéresser à la politique », a conclu la jeune Présidente du Conseil national suisse.

L.B.