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Conférence sur le droit international humanitaire
pour la protection des populations civiles en cas de conflit armé en Afrique

Niamey, 18-20 février 2002

La Conférence sur "Le droit international humanitaire pour la protection des populations civiles en cas de conflit armé en Afrique", s'est tenue à Niamey du 18 au 20 février 2002, à l'invitation de l'Assemblée nationale du Niger. Elle était organisé par l'Union parlementaire africaine (UPA) avec le soutien intellectuel de l'UIP et du CICR; le HCR était également associé à l'événement. La Déclaration adoptée par la Conférence constitue un véritable plan d'action africain pour assurer le respect du DIH. Lors de sa 170ème session, à Marrakech, le 23 mars 2002, le Conseil de l'Union interparlementaire a exhorté les parlementaires africains à porter cette Déclaration à l'attention de leur Parlement, à veiller à ce que les questions dont elle traite fassent l'objet d'un débat, et à ce que des suites concrètes soient données aux recommandations de la Conférence. Il s'est félicité de ce que l'UPA ait mis en place un groupe de suivi de la Déclaration et qu'il 'y ait associé d'office le Comité de l'UIP chargé de promouvoir le respect du DIH par l'entremise de sa Présidente, Mme B. Mugo. Le Conseil a estimé que l'organisation d'autres manifestations analogues en Afrique et dans d'autres parties du monde répondrait aux demandes d'assistance technique des parlements en matière de DIH qui ressortent d'une enquête parlementaire mondiale conduite par l'UIP et le CICR et qu'elle contribuerait à développer une véritable culture parlementaire dans ce domaine.

Déclaration finale

Nous, Présidents et membres des Assemblées Parlementaires nationales d'Algérie, d'Angola, du Burkina Faso, du Cabo Verde, du Cameroun, du Congo, de la Côte d'Ivoire, de l'Egypte, de l'Erythrée, de l'Ethiopie, du Gabon, de la Guinée, du Kenya,, du Maroc, de la Mauritanie, du Niger, du Nigéria, du Sénégal, du Soudan, du Rwanda et de la Tunisie

Réunis à l'invitation de l'Assemblée Nationale du Niger, du 18 au 20 Février 2002 à Niamey, à l'occasion de la première Conférence parlementaire africaine sur le droit international humanitaire pour la protection des populations civiles en cas de conflit armé, organisée par l'Union Parlementaire Africaine (UPA) avec le soutien de l'Union Interparlementaire (UIP) et du Comité International de la Croix Rouge (CICR) et présidée par le Président du parlement hôte, M. Mahamane Ousmane,

Soucieux de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour qu'en cas de conflit armé les populations civiles, dont nous sommes les représentants légitimes, bénéficient de la protection la plus efficace possible,

Conscients de l'utilité de ce premier échange d'expériences pour nous aider, avec le soutien d'experts qualifiés, à être plus sensibilisés aux principes du droit international humanitaire et être à même de remplir au mieux cette mission,

Profondément préoccupés par le nombre et l'extension des conflits en Afrique et alarmés par l'expansion de la violence, en particulier sous la forme d'actes de génocide, de meurtres, de déplacements forcés des personnes et d'usage de la force pour empêcher leur retour, de prises d'otages, de torture, d'enlèvements, de détentions arbitraires, d'exercice de la contrainte sur les civils pour qu'ils collaborent à la violence armée, et de destruction du patrimoine mobilier et immobilier appartenant à l'héritage culturel et spirituel, tous actes qui prennent souvent la population civile pour cible directe, lui causant ainsi d'immenses souffrances, et qui violent gravement et massivement les règles du droit international humanitaire,

Egalement préoccupés par le caractère prolongé des situations de réfugiés en Afrique du fait de la permanence de l'instabilité politique ou des conflits armés dans certains pays de la région, par la présence croissante d'éléments armés dans les camps de réfugiés, par les graves violations du principe universellement reconnu du non refoulement, par la xénophobie croissante à l'égard des réfugiés et par le niveau inadéquat de la solidarité internationale et du partage des responsabilités,

Conscients de la nécessité de mesures de prévention tant aux niveaux national et régional qu'international pour éviter l'émergence des conflits. Convaincus à cet égard que la meilleure des préventions est la bonne gouvernance, l'état de droit et le respect des droits de l'homme. Conscients en outre de la nécessité, en cette ère de mondialisation, de promouvoir la culture de la paix, le dialogue des civilisations et la solidarité pour assurer un climat de tolérance et de stabilité dans nos Etats et dans les relations internationales,

Reconnaissant les efforts entrepris par les Etats africains et l'OUA pour tenter de mettre fin aux conflits, ainsi que les actions entreprises par le CICR et les autres organisations humanitaires pour protéger et assister les populations civiles en cas de conflit armé,

Inquiets devant l'expansion rapide du commerce des armes et la prolifération incontrôlée de ces dernières, notamment celles qui peuvent avoir des effets indiscriminés ou causer des souffrances inutiles, comme les mines antipersonnel,

Adoptons la déclaration suivante :

  1. Nous nous engageons à renforcer notre soutien aux valeurs humanitaires et à respecter le droit international humanitaire.

  2. A cet effet, nous sommes résolus à ce que nos Parlements jouent pleinement leur rôle dans le processus d'adhésion aux instruments de droit international humanitaire et adaptent la législation nationale en vue d'assurer leur application effective.

  3. Nous nous engageons également, en tant que femmes et hommes élus par le peuple, à contribuer à la promotion de la conscience publique des valeurs humanitaires et à celle des normes et des règlements qui s'y rattachent.

  4. Nous réaffirmons notre détermination à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que nos Etats et toutes les parties à des conflits armés honorent leurs obligations en matière de droit international humanitaire et d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et au droit des réfugiés et respectent, en toutes circonstances, les droits des victimes des conflits armés et la dignité de la personne humaine.
Accession aux traités
  1. En accord avec le paragraphe 2 ci-dessus, nous prenons l'engagement de lancer un débat national et d'entamer un dialogue actif au sein de nos Parlements et avec nos Gouvernements en vue d'amener nos Etats, dans le cas où ils ne l'auraient pas encore fait, à adhérer aux traités suivants :

    (i) Droit International Humanitaire :
    Protocoles I et II additionnels aux Conventions de Genève du 12 Août 1949,
    Convention de 1980 sur certaines armes conventionnelles et ses Protocoles additionnels,
    Convention de 1993 sur la prohibition du développement, de la production, du stockage et du transfert des armes,
    Convention de 1997 sur la prohibition de l'usage, du stockage, de la protection et du transfert des mines antipersonnel et de leur destruction,
    Statut de la Cour Pénale Internationale, de 1998.
  2. De même, nous nous engageons à dialoguer activement au sein de nos Parlements et avec nos Gouvernements en vue d'amener nos Etats, dans le cas où ils ne l'auraient pas encore fait, à adhérer aux traités suivants :

    (ii) Protection des réfugiés et des apatrides :
    Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés,
    Protocole du 31 Janvier 1967 relatif au statut des réfugiés
    Convention du 10 Septembre 1969 traitant des aspects spécifiques des problèmes des réfugiés en Afrique,
    la Convention du 28 Septembre 1954 relative au statut des apatrides,
    Convention du 30 Août 1961 sur la réduction de l'apatridie.

    (iii) Protection des enfants :
    Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, 2000,
    Charte africaine des droits et du bien-être des enfants, 1999.

Législation nationale
  1. Nous reconnaissons qu'au delà de la simple adhésion formelle à des traités internationaux, il nous revient de nous assurer que le droit international humanitaire et le droit international relatif aux réfugiés sont adéquatement reflétés dans nos législations et réglementations nationales. A défaut, nous nous engageons à œuvrer en vue de l'incorporation de ces normes humanitaires dans nos législations nationales pour garantir leur pleine application. Pour ce faire, nous disposons de tous les outils parlementaires, allant des questions posées au Gouvernement aux propositions de loi et sommes prêts à les mettre à profit en nous appuyant sur les suggestions contenues dans le Guide pour les parlementaires intitulé "Respect du droit international humanitaire" publié par le CICR et l'Union interparlementaire, et le Guide pour les parlementaires intitulé « Protection des réfugiés : Guide sur le droit international relatif aux réfugiés », publié par le HCR et l'Union interparlementaire.

  2. Nous accueillons avec satisfaction les efforts d'intégration régionale et sous régionale et les soutenons. Dans cet esprit, nous encourageons l'usage de directives communautaires pour l'harmonisation des législations nationales relatives à la mise en œuvre du droit international humanitaire et du droit international relatif aux réfugiés.

  3. Nous entendons, notamment, accorder une attention particulière aux groupes vulnérables, et prendre toutes dispositions pour prévenir toute forme de recrutement d'enfants à des fins militaires en-dessous de l'âge de 18 ans.

  4. Nous nous engageons fermement à soutenir les recommandations contenues dans le Plan global d'application (PGA) adopté par la Réunion spéciale des experts techniques gouvernementaux et non gouvernementaux organisée par l'Organisation de l'unité africaine (OUA) et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) à Conakry en mars 2000 à l'occasion du 30ème anniversaire de la Convention de l'OUA.
Répression des violations graves
  1. Nous nous engageons à veiller à ce que nos Etats disposent de moyens législatifs de répression des violations du droit international humanitaire de sorte que toutes les personnes responsables de violations de ce droit soient traduites en justice et condamnées et que toute partie à un conflit armé qui en viole les règles paie, le cas échéant, les compensations correspondantes.
Mise en œuvre au niveau national
  1. Nous considérons qu'un comité pluridisciplinaire réunissant des représentants de toutes les branches concernées de l'Etat et diverses organisations compétentes, dont la Société nationale de la Croix-Rouge ou du Croissant-Rouge, peut être un mécanisme utile et efficace pour assurer la mise en œuvre du droit international humanitaire. Nous encourageons dès lors nos Parlements à favoriser la mise en place d'une telle structure si elle n'existe déjà, et à prendre des dispositions pour y être représentés et tenus informés de ses travaux et recommandations.

  2. Nous accueillons tout conseil et assistance que les services compétents du Comité International de la Croix Rouge sont en mesure d'apporter à cet effet. Nous accueillons de même l'expertise du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et de l'Organisation internationale des migrations (OIM), dans les domaines de leurs compétences respectives.
Faciliter l'accès aux civils en cas de besoin
  1. Nous convenons que tous les civils qui le nécessitent doivent être en mesure de bénéficier d'actions de secours humanitaire impartiales. Aussi promettons-nous d'agir en vue d'offrir aux organisations humanitaires un accès non restrictif aux populations qui, en temps de conflit armé, en ont besoin et de faciliter la libre circulation des matériels d'assistance. Les organisations humanitaires neutres, impartiales et indépendantes, à savoir le Comité International de la Croix-Rouge (CICR), la Fédération Internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, les sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, ainsi que les autres organisations internationales, notamment le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, doivent compter sur notre soutien total pour un accès effectif et adéquat aux personnes civiles en vue de leur fournir protection et assistance humanitaire, en conformité avec les dispositions pertinentes du droit international.
Diffusion du droit international humanitaire et des valeurs humanitaires ainsi que du droit international relatif aux réfugiés
  1. Nous nous engageons à promouvoir la connaissance du droit international humanitaire et des valeurs humanitaires ainsi que du droit international des réfugiés parmi les parlementaires aux niveaux national, régional et sous-régional.

  2. Nous souhaitons que des séminaires et des ateliers pour les parlementaires soient organisés sur ces questions aux niveaux national, régional et sous-régional avec la coopération des organisations compétentes, notamment par le biais de l'UPA et des autres organisations parlementaires africaines.

  3. Nous encourageons le CICR et les Sociétés Nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge à intensifier leurs efforts pour diffuser les règles du droit international humanitaire dans nos Etats.
Suivi de la Conférence

Soucieux que cette première Conférence africaine ne demeure pas un acte isolé mais ouvre, au contraire, la voie à un processus de longue haleine qui favorise le renforcement dans nos Etats des règles du droit international humanitaire et du droit international relatif aux réfugiés pour une meilleure protection des populations civiles en cas de conflit armé,

  1. Nous nous engageons à porter la présente Déclaration à l'attention de nos assemblées et à susciter en leur sein un débat de fond sur l'état de la législation nationale s'agissant du droit international humanitaire et du droit international relatif aux réfugiés et des pratiques et situations qui méritent notre attention, y compris eu égard à l'action des organisations humanitaires.

  2. Nous entendons veiller à ce que nos parlements nationaux mandatent une de leurs Commissions permanentes pour superviser les actions parlementaires en relation avec le droit international humanitaire et le droit international relatif aux réfugiés, ou mettent en place une sous-commission à cet effet.

  3. Nous encourageons également, en coopération avec l'OUA, le partage et l'échange d'information et d'expertise au sein des parlements africains en vue de contribuer à l'établissement d'un inventaire des pratiques africaines respectueuses du droit international humanitaire et du droit international relatif aux réfugiés.

  4. Nous demandons aux organisateurs de la Conférence de transmettre cette Déclaration à l'OUA pour information et distribution aux réunions des Chefs d'Etat et du Conseil des Ministres. Nous leur demandons de même de la porter à l'attention des organes compétents de l'UPA, de l'Union interparlementaire et du CICR ainsi que des autres organisations internationales compétentes, telles le HCR et l'OIM.

  5. Nous demandons aux autorités politiques compétentes de nos différents Etats d'inscrire les valeurs humanitaires et la protection des populations civiles dans le fonctionnement des organes de l'Union Africaine qui doit prendre le relais de l'OUA après le sommet de Durban, en Juillet 2002. Ces valeurs doivent en effet être intégrées dans la liste des outils et instruments juridiques pour servir de référence en cas de conflits armés.

  6. Nous nous engageons à porter cette Déclaration à l'attention de nos Gouvernements et à les inciter à prendre toutes les dispositions nécessaires pour répondre aux préoccupations qu'elle traduit.

  7. Nous demandons à l'UPA d'instituer le Comité de coordination de cette Conférence en organe permanent chargé de son suivi au sein de l'UPA, avec le soutien du Comité de l'Union Interparlementaire chargé de promouvoir le respect du DIH, du CICR et des autres organisations internationales compétentes, et appelons les partenaires dans l'organisation de la Conférence et les bailleurs de fonds qui en ont généreusement facilité la tenue, à soutenir et encourager son action de suivi.

  8. Nous demandons à l'UPA, à l'Union interparlementaire et au CICR de diffuser largement les résultats de cette Conférence en vue d'en faciliter le suivi dans les domaines examinés.

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