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Les femmes au parlement en 2023 : la préoccupante question de la violence sexiste en politique

Article de fond de l'UIP n° 2

Le rapport annuel de l'UIP sur les femmes au parlement, basé sur les élections tenues en 2023, fait état de quelques progrès limités, mais aussi de tendances inquiétantes - notamment des femmes qui quittent la politique en invoquant l'épuisement et les menaces. Dans cet article de fond de l'UIP, nous reprenons les principaux éléments du rapport ainsi que trois études de cas réalisées dans le monde entier.

“Plus de femmes au parlement est synonyme d'institutions plus inclusives et plus représentatives, et donc de démocraties plus fortes et plus saines. Nous devons convaincre les jeunes femmes et les filles que, malgré la difficulté de la tâche, elles méritent de s'asseoir à la table des négociations, de participer à la prise de décision et d'améliorer la vie des gens par le biais de leur travail.” Dr Tulia Ackson, Présidente de l’UIP et Présidente du Parlement de la République-Unie de Tanzanie

Études de cas

Pologne

L'avortement a pris une importance décisive lors des élections législatives en Pologne. Bien qu'un léger fléchissement du nombre de femmes sénatrices ait été enregistré à l'issue de ces élections, cette question a incité un grand nombre d'électeur à se rendre aux urnes et a influé sur les politiques en faveur de l'égalité des sexes. 

Les élections se sont révélées très conflictuelles, les femmes candidates étant confrontées à des attaques verbales misogynes, à des agressions physiques, à des menaces de mort et à la diffusion d'images truquées.

La colère à l'égard du parti au pouvoir, le Parti Droit et Justice (PiS), a été alimentée, entre autres attaques à l’encontre des droits des femmes, par les restrictions croissantes imposées par ce dernier en matière d'avortement (restrictions pourtant déjà parmi les plus dures d'Europe). Une décision de justice de 2020 a restreint encore plus durement l'avortement, ce qui a entraîné le décès de plusieurs femmes, décuplant la colère de l'électorat. 

La Coalition civique (KO), principal parti d'opposition, a déclaré que les droits des femmes étaient "la question numéro 1". Ce parti a activement défendu les 48 % de candidates sur ses listes et promis de revenir sur l'interdiction de l'avortement. Cet argument a porté auprès des électeurs, tout spécialement les femmes et les jeunes, qui ont été particulièrement nombreux à se rendre aux urnes, privant le PiS d’un certain nombre de sièges pour les confier à une coalition de partis centristes et libéraux. 

Fin 2023, les femmes détenaient 29,3 % des sièges de la chambre basse et 19 % de ceux de la chambre haute, deux chiffres inférieurs à la moyenne européenne, qui se situe à 31,6 %. Les femmes, qui représentaient pourtant 44,5 % des candidats, n'étaient que 24,9 % à la tête des listes présentées par les partis.

 

Sierra Leone

En 2023, la Sierra Leone a accompli d'importants progrès en matière de représentation des femmes au parlement, à mettre en grande partie sur le compte des quotas électoraux de femmes. La loi sur l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes adoptée en janvier 2023 exige que 30 % au moins des sièges parlementaires soumis au vote, des portefeuilles ministériels et des postes dans d'autres institutions soient détenus par des femmes.

Cette nouvelle loi a permis de faire considérablement augmenter la représentation politique des femmes. Auparavant, ces dernières ne représentaient que 14,5 % des élus siégeant au parlement. Suite au renouvellement de 2023, toutefois, ce chiffre a augmenté pour atteindre 30,4 %. De surcroît, une femme a été élue au scrutin indirect à l'un des 14 sièges réservés aux chefs traditionnels provinciaux, ce qui a porté la représentation totale des femmes à 28,2 % des 149 sièges, soit un chiffre nettement supérieur à la moyenne de l’Afrique de l’Ouest, qui s’établit à 18,4 %. 

L'UIP, qui collabore avec la Sierra Leone depuis 2014, a organisé des ateliers en 2023 aux côtés du parlement de ce pays dans le but de promouvoir la compréhension de la nouvelle loi et le soutien en sa faveur. Ces ateliers ont formulé des recommandations concernant le soutien à fournir aux candidates et incité les parlementaires hommes et femmes à plaider en faveur de listes de partis plus inclusives. 

Les élections ont confirmé les données antérieures indiquant que les quotas (s'ils sont bien conçus et appliqués avec efficacité) constituent un facteur décisif pour accroître la représentation des femmes. La Sierra Leone a considérablement contribué aux progrès d'ensemble réalisés par l'Afrique sub-saharienne, où les femmes ont remporté 19,1 % des sièges parlementaires dans les 13 chambres dans lesquelles des élections se sont déroulées en 2023. Ce résultat se situe 3,9 points de pourcentage au-dessus de la proportion de sièges remportés par des femmes à l'issue des renouvellements parlementaires précédents pour les mêmes chambres, soit la hausse la plus importante de toutes les régions en 2023. 

 

Équateur

Le parlement monocaméral de l'Équateur a fait un pas dans le sens de la parité en 2023 grâce à une loi sur l'égalité des sexes et un mode de scrutin faisant appel à la représentation proportionnelle. Alors que la représentation des femmes stagnait à 38 % environ, la nouvelle loi, adoptée en 2020, a marqué un tournant.

La loi électorale équatorienne imposait déjà aux partis de présenter le même nombre de candidats masculins et féminins sur leurs listes de candidats en alternant entre les hommes et les femmes. La nouvelle loi exige dorénavant des partis qu'ils augmentent progressivement le nombre de femmes figurant en tête de leurs listes. En 2021, le pourcentage requis était de 15 %. Ce chiffre a été porté à 30 % pour les élections de 2023 et il atteindra 50 % en 2025. 

Les retombées de cette loi se sont réellement fait sentir en 2023, année au cours de laquelle le nombre de femmes élues au parlement a considérablement augmenté. Les femmes ont remporté 59 des 137 sièges en lice (soit une proportion de 43,1 %, c’est-à-dire 5,1 points de pourcentage au-dessus des élections précédentes). 

Cette progression a aidé la région des Amériques à conserver sa première place en matière de représentation des femmes avec une moyenne de 35,1 % des sièges parlementaires détenus par des femmes dans toutes les chambres et tous les pays de la région en 2023.