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Bulletin de l'innovation | 19e édition | 01 oct 2024
micronesia

L'Assemblée législative de Kosrae, États fédérés de Micronésie. Crédits photo : Avinash Bikha/CIP de l'UIP
 

 

Innovations pragmatiques pour les parlements des petits États insulaires en développement

Les parlements des petits États insulaire en développement du Pacifique, qui œuvrent dans un contexte d'isolement géographique et de distances énormes, se trouvent dans des situations très particulières. Pour ces parlements, il est souvent difficile de déployer et d'utiliser des solutions informatiques fournissant aux parlementaires et au public les informations parlementaires dont ils ont besoin.

Bien souvent, les parlementaires sont disséminés dans de vastes archipels, à l'intérieur desquels les déplacements entre les îles principales et périphériques sont fréquemment onéreux. Ces parlements ont aussi des programmes de travail moins intenses et ne tiennent que quelques plénières par an. Leur administration parlementaire est de taille modeste, allant d’une dizaine à une trentaine de personnes, et il arrive souvent que leur service informatique ne compte qu'un seul salarié, voire aucun, l'appui informatique étant assuré par le gouvernement.

L'équipe du CIP a étudié de près les efforts de transformation numérique consentis dans la région en entretenant des échanges réguliers avec le Bureau du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour le Pacifique à Fidji. Ces observations (de la pratique des parlements des Îles Cook, des États fédérés de Micronésie - dont les quatre assemblées législatives de Chuuk, Kosrae, Pohnpei et Yap - de Kiribati, des Palaos et des Îles Salomon) révèlent des lignes de fond en matière de défis et d'innovations pragmatiques.

La gestion de l'infrastructure informatique installée sur place (et financée par des donateurs) demeure onéreuse et finit par devenir trop lourde :  Il arrive fréquemment que l'infrastructure informatique (serveurs, équipement de réseau, etc.) financée par des donateurs dans le cadre de projets successifs finisse par être hors service. Dans certains cas, le personnel informatique du parlement n'est pas suffisamment formé pour entretenir un tel équipement. Dans d'autres, lorsque certains collaborateurs clés quittent le parlement pour aller travailler dans le privé, ces systèmes tombent en désuétude. De surcroît, les parlements ne sont pas assez bien préparés pour posséder une telle infrastructure et se charger de son entretien, y compris les coûts des licences des logiciels. De ce fait, la viabilité de ces gros investissements est incertaine. Les solutions plus légères constituent souvent un choix plus rationnel.

Starlink a élargi l'accès à Internet : Le déploiement de Starlink a bouleversé la donne dans le Pacifique. Les avantages de l'amélioration de la connexion Internet se font sentir partout dans la région et les parlements (à l'instar de bien d'autres entreprises) investissent dans leur propre équipement et abonnement Starlink, dont le prix est avantageux par rapport à celui proposé par les réseaux mobiles et les fournisseurs de services Internet locaux. Par exemple, la première organisation ayant déployé Starlink à Kosrae (États fédérés de Micronésie) était l'assemblée législative de l'État, qui a donné l'exemple à bien des structures sur l'île en assumant l'intégralité des coûts engendrés par ce déploiement. Les parlements, qui tirent profit des avantages offerts par l'amélioration de l'accès, doivent également gérer les risques associés, notamment ceux qui découlent de la dépendance à l'égard d'un prestataire unique, la gestion de la largeur de bande et le cycle de vie de l'équipement satellitaire, et ils ont prévu des solutions de secours, le cas échéant. 

Les solutions fondées sur le nuage gagnent du terrain pour la gestion de la documentation : L'amélioration de la connectivité Internet rend les services et les solutions fondés sur le nuage plus accessibles aux administrations parlementaires pour la gestion de la documentation. En souscrivant à des services en ligne de stockage, gestion et diffusion des documents sur le nuage, les parlements sont en mesure d'adopter une stratégie fondée sur le nuage leur évitant d'investir dans une infrastructure locale onéreuse et délicate à entretenir. Même dans les cas dans lesquels l'analyse des coûts-bénéfices ne révèle que peu de différence entre la solution en nuage et les installations sur place, la première présente de toute évidence des avantages sur le plan de la pérennité, de la sécurité et de la gestion des données. Toutefois, lorsqu'ils optent pour des services en nuage, les parlements doivent devenir résilients pour parer aux problèmes qui pourraient se poser avec le prestataire de service ou, plus généralement, l'accès Internet. Les plans d'urgence pourraient, par exemple, prévoir la détention de copies locales des données hébergées sur le nuage, tout particulièrement au vu du fait que les solutions de stockage sur le réseau de la dernière génération semblent nettement meilleur marché et plus simples à entretenir (y compris par du personnel non spécialisé) que les précédentes. La décision devant ultérieurement être prise concernant ce qui doit être stocké sur le nuage et ce qui doit l'être sur place doit reposer sur une politique claire en matière de données parlementaires et une connaissance approfondie des questions de protection des données.

La visioconférence se fait une place de plus en plus centrale dans les travaux quotidiens du parlement : Le coût des déplacements et des rencontres en chair et en os est élevé. Un grand nombre de parlements ayant expérimenté les visioconférences pendant la pandémie de COVID-19 s'efforcent désormais de mieux intégrer cette technologie dans leurs travaux quotidiens, tout particulièrement pour les commissions. La pandémie a également été l'occasion de mettre à l'essai les plénières hybrides, mais cette pratique n'a pas été adoptée de façon généralisée ni permanente. Toutefois, le Parlement des Îles Cook a commencé, grâce au soutien du Bureau du PNUD pour le Pacifique à Fidji, à modifier son règlement intérieur pour autoriser la tenue des réunions régulières en format hybride. 

L'interaction avec les citoyens exige la mise à disposition des contenus sur les principaux réseaux sociaux : Les parlements du Pacifique sont confrontés à des difficultés en matière de communication et de dialogue avec les citoyens. Les chaînes et les services nationaux de radiodiffusion, télévision comme radio, demeurent du ressort des gouvernements, ce qui place les parlements en position de dépendance opérationnelle. Des signes positifs de diversification apparaissent toutefois et de nombreux parlements découvrent les avantages de la diffusion en direct des plénières sur YouTube ou Facebook, façon de faire qui crée automatiquement une archive vidéo et facilite la tâche aux citoyens désireux de partager les contenus. L'accès à Internet reste cependant onéreux pour les citoyens ordinaires et les technologies plus anciennes, telles que la radio, ont encore toute leur place. L'Assemblée de Kiribati, qui est confrontée à la difficulté de devoir diffuser les débats parlementaires par l'intermédiaire du service radiophonique national, s'est déclarée intéressée par la création d'une petite unité radiophonique parlementaire (inspirée de l'exemple de l'Assemblée nationale de la Zambie, présenté dans le Bulletin de l'innovation – deuxième édition).

Les parlements ont tout à gagner à mettre en commun leurs connaissances :  Les administrations parlementaires (secrétaires généraux et personnel parlementaire, tant spécialistes de l'informatique que non spécialistes) ont tout à gagner à s'informer auprès des autres parlements du Pacifique de la façon dont ils ont abordé les défis posés par les technologies telles que celles qui ont été évoquées ci-dessus. La mise en commun des connaissances entre les parlements à ces niveaux tombe bien évidemment sous le sens et le CIP reste déterminé à collaborer avec les parlements du Pacifique, ainsi qu'avec le Bureau du PNUD pour le Pacifique à Fidji et d'autres partenaires, pour faciliter ces importants échanges.