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Frédéric Passy, apôtre de la paix

Le monde est fait d’utopies réalisées. L’Utopie d’aujourd’hui est la réalité de demain – Frédéric Passy

Frédéric Passy passa 50 années de sa vie à promouvoir l’arbitrage et la réconciliation entre les nations. Il devint l’« apôtre de la paix », en remportant le premier Prix Nobel de la paix en 1901, en même temps qu’Henri Dunant, fondateur du Comité international de la Croix-Rouge.

Passy naquit à Paris le 20 mai 1822, dans une famille de l’establishment français. Son père était un vétéran de Waterloo et son oncle, Hippolyte Passy, fut ministre sous Louis-Philippe et Louis-Napoléon.

Juriste de formation, il entra dans la fonction publique à l’âge de 22 ans comme comptable. Mais sous l’influence de son oncle, il démissionna après trois ans de service pour étudier l’économie, avant de devenir un éminent spécialiste connu également pour ses talents d’orateur.

Il commença à s’intéresser à la question de la paix au moment de la guerre de Crimée (1853–1856). Alors que le conflit touchait à sa fin, en France, la Loire entra en crue, causant d’innombrables dégâts. Passy fut frappé de constater à quel point les hommes devaient lutter pour se remettre d’une catastrophe naturelle, alors qu’ils considéraient comme normales des catastrophes créées par l’homme telles que la guerre.

Plus tard, en 1867, alors qu’une guerre germait entre la France et la Prusse, en rapport avec la souveraineté du Luxembourg, Passy écrivit dans le journal français Le Temps un plaidoyer pour la paix qui eut un fort retentissement, appelant à la création d’une société internationale pour la paix afin d’éviter le conflit.

Fort du soutien acquis auprès de l’opinion publique, il créa la Ligue internationale et permanente de la paix pour pouvoir prévenir les conflits dans l’avenir. La Ligue ne parvint pas à empêcher la guerre franco-prussienne de 1870, ce qui conduisit à sa dissolution. Mais, loin de se décourager, Passy créa la Société française des amis de la paix, qui devint en 1889 la Société française pour l’arbitrage entre nations, à vocation plus spécifique.

Républicain convaincu, Passy refusa de participer à un quelconque gouvernement sous Napoléon III. Il fut finalement élu à la Chambre des députés en 1881, puis réélu en 1885. Au Parlement, il défendit la réforme sur la législation du travail, notamment sur les accidents du travail. Il combattit également la politique coloniale du gouvernement.

Outre l’élaboration d’un projet sur le désarmement, il présenta en 1887 une motion plaidant pour l’arbitrage des différends internationaux. A peu près au même moment, un parlementaire britannique, William Randal Cremer, était parvenu à persuader 234 de ses pairs de signer un document proposant un traité d’arbitrage avec les Etats-Unis.

Ayant eu vent des activités de son homologue français, Cremer lui proposa à celui-ci d’organiser à Paris une rencontre entre parlementaires français et britanniques pour discuter de la façon dont ils pourraient faire avancer l’idée d’arbitrage. La rencontre eut lieu en octobre 1888, en présence de neuf parlementaires britanniques et 25 de leurs homologues français. Bien que de taille relativement modeste, la réunion permit de semer les graines d’une deuxième rencontre l’année suivante qui attira 83 parlementaires français et britanniques, rejoints par 11 de leurs homologues venus de sept autres pays. Le 30 juin 1889, la rencontre fut institutionnalisée, donnant naissance à la Conférence interparlementaire, présidée par Passy.

Ce dernier continua de développer l’UIP en tant qu’organisation défendant le recours à l’arbitrage pour régler les conflits d’ordre politique ou commercial.

En 1901, Passy reçut le premier Prix Nobel de la paix en reconnaissance de son engagement indéfectible pour la paix mondiale, combat qu’il menait déjà depuis près de 50 ans.

Malgré son âge avancé et sa vue défaillante, Passy continua à travailler et à écrire, et publia en 1909 son ouvrage Pour la Paix qui retrace son action en faveur de l’harmonie mondiale. Largement récompensé et décoré par son pays, la France, Passy s’est éteint à Paris le 12 juin 1912, à l’âge de 90 ans.