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Actualités en bref

Des parlements amis des bébés

Bundestag

Une parlementaire porte un bébé pendant qu'elle vote lors d'une séance du Bundestag allemand. ©AFP/ SCHWARZ 

En 2017, Yuka Ogata a emmené son fils en bas âge dans l'enceinte de l'assemblée municipale de Kumamoto, au Japon. Elle avait pris cette décision pour mettre en lumière les difficultés rencontrées par les mères japonaises qui tentent de poursuivre leur carrière malgré une crise nationale en matière de capacité de garde d'enfants.

Mme Ogata a toutefois été chassée de l'hémicycle par ses collègues masculins.

Un an plus tard, Madeleine Henfling, députée allemande, a été priée de quitter l'hémicycle de l'assemblée parlementaire du Land de Thuringe pendant un vote parce qu'elle portait en écharpe son fils, âgé de six semaines, qui sommeillait.

"J'ai l'impression d'être une parlementaire de seconde classe simplement parce que je dois m'occuper d'un enfant", avait-t-elle déclaré.

En 2019, la députée danoise Mette Albildgaard a vécu la même expérience lorsqu'elle a tenté d'entrer dans la salle des débats nationale avec son bébé car les dispositions prises pour la garde de celui-ci n'avaient pas abouti.

Ces incidents, ainsi que d'autres, ont suscité un débat sur les défis que représente la conciliation de la vie de parent et d'une carrière en politique.  Le problème touche aussi bien les femmes que les hommes : des pères parlementaires ont également fait part de leurs préoccupations.

Le parlementaire britannique Jonathan Reynolds a raconté qu’à plusieurs reprises il a dû soit amener ses jeunes enfants au travail, soit improviser une solution de garde d'enfants. Il a souligné que les exigences de la vie publique peuvent être extrêmement difficiles pour les parents dans le meilleur des cas, ajoutant : "parfois des situations inattendues se produisent et on a besoin de soutien provenant de l'endroit où l'on travaille".

La mise en place de parlements sensibles au genre est essentielle à l'instauration d'une véritable démocratie. Les parlements sensibles au genre ne se contentent pas de prévoir des crèches : ce sont aussi des institutions qui répondent aux besoins des parents parlementaires qui doivent s'occuper de leurs enfants.

Il s'agit de politiques favorables à la famille, telles que le congé parental et la possibilité pour les parlementaires de se déplacer avec leur bébé et une personne pour les aider. L'utilisation des nouvelles technologies au parlement, en particulier pour le travail et le vote à distance, peut également favoriser l'égalité et une culture plus favorable à la famille.

Au Parlement néo-zélandais, où les femmes sont plus nombreuses que les hommes, l'approche est beaucoup plus inclusive, pour les deux sexes. En 2019, une vidéo du Président du parlement Trevor Mallard est devenue virale lorsqu'il a été filmé en train de nourrir calmement un nourrisson, permettant ainsi au père de l'enfant de poursuivre le débat.

Le Parlement néo-zélandais dispose d'installations enviables pour les parents : une crèche, une aire de jeux, un accès familial à une piscine et à des cours de fitness, et même un potager planté par les enfants.

Les obstacles aux femmes en politique

Pourtant, les politiques et les dispositions ne constituent qu'une partie de la solution. Selon certaines données, le fardeau que représente la conciliation de la vie familiale et de la vie politique pèse plus lourdement sur les femmes.

Une étude mondiale réalisée en 2017 a révélé que les femmes parlementaires étaient moins susceptibles d'être mariées que les hommes et plus susceptibles d'avoir moins d'enfants. Des recherches menées par l'Université Birkbeck de Londres en 2014 ont révélé que 45 % des femmes parlementaires britanniques n'avaient pas d'enfants, alors que la moyenne nationale est de 20 %. À titre de comparaison, seuls 28 % de leurs homologues masculins n'avaient pas d'enfants.

Une faible représentation des femmes est néfaste pour les parlements et les personnes qu'ils représentent. Des preuves concrètes montrent que la présence de femmes à des postes de direction a des effets positifs pour tous. Une étude réalisée en 2020 par le King's College de Londres a montré que lorsque les gouvernements comptent des femmes, les sociétés sont plus solidaires et la corruption est moins répandue, et les pays dirigés par des femmes sont moins susceptibles d'entrer en guerre.

Malgré tout, les femmes représentent moins de 27 % des parlementaires dans le monde.

Les mesures visant à encourager davantage de femmes à entrer au parlement, telles que les quotas pour une meilleure représentation, commencent à avoir des retombées, mais pas assez rapidement. Au rythme actuel, il faudra encore 60 ans aux parlements du monde entier pour parvenir à la parité hommes-femmes. Les parlements peuvent notamment réfléchir aux moyens de changer l'idée selon laquelle les charges parentales incombent, par défaut, aux mères.

Vers la parité hommes-femmes dans les parlements

Les travaux visant à réduire l'inégalité entre les sexes dans les parlements s'appuieront sur l'élan considérable donné au cours de la dernière décennie.

En 2012, les Parlements membres de l'UIP ont adopté à l'unanimité un Plan d'action pour des parlements sensibles au genre. Depuis 2016, notre outil d'auto-évaluation permettant d’évaluer la sensibilité au genre les aide à examiner leurs pratiques et politiques en vigueur, à recenser les domaines à réformer, à planifier le changement et à mettre en place des mécanismes de suivi des avancées.

Au cours de la dernière décennie, les parlements ont réalisé des progrès. En 2022, pour la première fois, aucun parlement au monde n’était composé de membres masculins exclusivement. C'est aussi l'année où les Membres de l'UIP ont adopté la Déclaration de Kigali, qui appelle tous les parlementaires à faire progresser l'égalité des responsabilités en matière de soins entre les hommes et les femmes, et à montrer l'exemple en assumant 50 % des tâches ménagères quotidiennes pour leur famille, qu'ils soient hommes ou femmes. En outre, les Parlements membres de l'UIP se sont engagés à prendre dix mesures au cours des dix prochaines années pour devenir des parlements solidaires, en répondant pleinement aux obligations en matière de soins de leurs parlementaires, hommes et femmes, et des membres de leur personnel dans l'exercice de leurs fonctions parlementaires.