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Opinions

Dix moyens de renforcer l’égalité des sexes à l’ONU

Equality for all

© Shaun Dawson (CC BY-ND 2.0)

L'égalité des sexes est essentielle à la réalisation des droits de l'homme de chacun. Sans elle, nous n'avons aucun espoir de réaliser les 17 Objectifs de développement durable. Pourtant, aucun pays n'est encore parvenu à la pleine égalité des sexes. En ce qui concerne la représentation des femmes au sein des parlements dans le monde, nous sommes encore en dessous de 25 pour cent et, au rythme actuel des avancées, il faudra encore cinquante ans pour atteindre la parité des sexes.

Le Conseil des droits de l'homme (CDH) et ses mécanismes ainsi que les organes conventionnels des Nations Unies sont au cœur du cadre international des droits de l'homme, qui est censé promouvoir l'égalité des sexes dans le monde. Cependant, le nombre de femmes représentées dans les organes conventionnels des Nations Unies est extrêmement faible. Si même ces organes ne peuvent pas garantir l'égalité des sexes, quelles institutions pourraient le faire ? Pour être respectés, les organismes chargés de faire observer les droits de l'homme dans le monde doivent montrer l'exemple.

Lors du récent débat annuel du CDH sur la prise en compte des questions de genre, nous avons proposé 10 moyens d'atteindre l'égalité des sexes à l'ONU, y compris au sein du CDH et des organes conventionnels. Nous avons besoin d'idées novatrices pour promouvoir l'égalité des sexes, mais, par-dessus tout, il est nécessaire de procéder à des changements structurels simples pour réformer les processus de nomination et d'élection, et créer un environnement favorable. Les 10 recommandations ci-dessous ont toutes été mises en œuvre avec succès par d'autres organisations internationales.

  1. Institutionnaliser les mesures d'égalité dans toute la mesure du possible afin d’effectuer des changements structurels.
  2. Adopter des lignes directrices claires qui fixent sans équivoque l'égalité des sexes comme critère pour la nomination et l'élection des candidats.
  3. Mettre en place des procédures officielles, ouvertes et transparentes pour la sélection et la nomination des candidats, notamment en faisant de l'égalité des sexes un objectif spécifique du processus électoral. 
  4. Faire en sorte que les listes de candidats présélectionnés soient équilibrées sur le plan de l'égalité des sexes. Lorsqu'ils soumettent des candidatures à des postes internationaux, les États Membres devraient envisager de désigner au moins deux personnes – une femme et un homme – si le processus électoral le permet. Les pays devraient envisager la parité des sexes comme un objectif lorsqu'ils votent pour pourvoir ces postes.
  5. Appliquer des mesures temporaires spéciales avec des objectifs clairement définis en matière d’égalité des sexes. Il s'agirait par exemple d'instaurer une alternance obligatoire entre les sexes pour tout mandat au titre des procédures spéciales ou de donner la priorité à l'élection de femmes à des postes auxquels elles sont généralement sous-représentées.
  6. Lancer une politique de diversité et d'inclusion fixant des objectifs obligatoires, par exemple la réalisation d'un équilibre entre les sexes à l’horizon 2020.
  7. Assurer un suivi, recueillir des données et présenter un rapport public annuel sur l'équilibre entre les sexes, étant donné qu'il est impossible de réparer ce que l'on ne voit pas. La conception d'une déclaration annuelle, énonçant des objectifs mesurables et des étapes pour la mise en œuvre d'une politique de diversité et d'inclusion, ainsi que l’élaboration d'un rapport d'étape permettront de garantir que toutes les statistiques sur la diversité et l'inclusion sont divulguées.
  8. Offrir aux personnes élues un soutien familial afin d'encourager celles et ceux qui assument les principales responsabilités familiales, en particulier les femmes, à présenter leur candidature à des postes.
  9. Encourager expressément la participation de candidats provenant d'un large éventail de disciplines (p. ex., les chercheurs en sciences sociales) et possédant des connaissances dans différents domaines, une expérience non conventionnelle et d'autres compétences précieuses.
  10. Appliquer les meilleures pratiques énoncées dans le Guide pour une assemblée prenant en compte l'égalité des sexes, qui se fonde sur les meilleures pratiques novatrices qui ont déjà été appliquées et validées dans d'autres organisations internationales.

Pourquoi cela nous préoccupe autant ?

Au CDH, les femmes expertes sont surreprésentées lorsqu'il s'agit des groupes de travail et des mandats chargés des questions relatives aux droits des femmes et des enfants, et sous-représentées dans les forums sur la sécurité et la torture. S'agissant des procédures spéciales des Nations Unies, seuls 36 des 80 postes existants étaient occupés par des femmes en juillet 2019. De plus, sur les 56 mandats spéciaux des Nations Unies, 15 n'ont JAMAIS été détenus par une femme, y compris les mandats portant sur le droit à la santé, la torture et la liberté d'expression. Nous recommandons que, lors des prochaines nominations des titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, les femmes soient sélectionnées pour des postes qu'elles n'ont jamais occupés auparavant.

Sur les 10 organes conventionnels, seuls le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes et le Comité des droits de l'enfant, ainsi que le Sous-Comité pour la prévention de la torture, comptent 50 pour cent de femmes ou plus. Alors que la Convention relative aux droits des personnes handicapées contient des dispositions spécifiques sur l'importance de l'équilibre entre les sexes, le Comité y relatif ne comptait qu'une seule femme parmi ses 18 membres jusqu'en juin 2018 (actuellement six membres sont des femmes, suite à une forte pression publique). Cette situation s'explique en partie par le manque de transparence et les compromis faits pour des motifs politiques au cours des processus de nomination et d'élection aux organes conventionnels, dont le plus important concerne l'égalité des sexes au sein de ces organes.

En outre, les données sur l'égalité des sexes dans de nombreuses réunions de l'ONU restent floues, notamment en ce qui concerne les délégations participant aux sessions du CDH. Pourtant, nous savons pertinemment que la divulgation des données est un premier pas vers le progrès.

Il faut que les organisations internationales joignent le geste à la parole. Par exemple, l'Union interparlementaire (UIP) recueille des données sur la représentation des femmes à ses Assemblées et les diffuse publiquement. Soucieuse de faire avancer les choses, elle a mis en place plusieurs mesures incitatives et sanctions à l'intention de ses Membres afin de garantir l'égalité des sexes dans sa structure de gouvernance et au sein de ses délégations. Lors de la dernière Assemblée de l'UIP, qui s’est tenue en octobre 2019 à Belgrade (Serbie), l'Organisation a adopté des amendements visant à renforcer les mesures existantes. Désormais, le droit de vote des délégations non mixtes au sein du Conseil directeur sera ramené de trois voix à une, alors que ces délégations conservaient auparavant deux de leurs trois voix. En outre, les sanctions qui limitent le nombre de délégués qu'un parlement a le droit d'envoyer à une Assemblée sont désormais appliquées après que les parlements ont envoyé des délégations non mixtes à deux Assemblées consécutives au lieu de trois. Cette étape témoigne du fait que tout est possible lorsqu'il existe une volonté politique.

Caitlin Kraft-Buchman, PDG / Fondatrice de Women@theTable
Martin Chungong, Secrétaire général de l'Union interparlementaire
Elizabeth S. Salmón, Présidente du Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies
Alejandra Vicente, Membre du Secrétariat de la Campagne GQUAL 

 

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